Copropriétés et banques : le grand désamour ?

Le CRI n°469 - Décembre 2022
Copropriétés et banques : le grand désamour ?

Pour les non-pratiquants, le droit bancaire reste en général hermétique et, convenons-en, pour le plus grand nombre, les non-initiés et les usagers se perdent dans le dédale des règlementations.

Pourtant, la vie quotidienne et les mœurs contraignent à faire appel aux institutions bancaires et par voie de conséquence, de respecter des conditions générales d’adhésion (lesquelles ne sont généralement pas lues) et des conditions particulières propres à l’institution bancaire retenue.

Pourtant, la vie quotidienne et les mœurs contraignent à faire appel aux institutions bancaires et par voie de conséquence, de respecter des conditions générales d’adhésion (lesquelles ne sont généralement pas lues) et des conditions particulières propres à l’institution bancaire retenue.

Alors que la circulation des espèces est légalement de plus en plus limitée, toutes ces personnes tant physiques que morales manipulant des fonds en espèces doivent nécessairement leur confier leur argent.

La banque est donc devenue pour tous un passage obligé, même pour la copropriété, qu’elle soit perçue comme consommateur ou comme personne morale.

Comment faire si l’accès, contraint et forcé, n’est pas ou plus possible ?

Témoignages

-Un copropriétaire syndic nous assure avoir dû depuis juillet accomplir un parcours du combattant et démarcher 8 institutions différentes, sans succès à ce jour.

Après clôture d’office du compte bancaire existant de sa copropriété sans qu’un motif ait été communiqué, la banque a procédé à une « ré-ouverture », sans toutefois permettre un accès au compte à distance par Internet avec carte bancaire. Pourtant, les opérations au guichet se restreignent chaque jour et deviennent de plus en plus onéreuses. Donc, bien que le compte bancaire soit provisionné aucune possibilité d’en suivre les mouvements et aucune possibilité d’effectuer des paiements ou de retirer de l’argent.

De guerre lasse, ce syndic a décidé de clôturer ledit compte et de s’adresser à une autre institution bancaire… :

  • sa demande d’ouverture de compte bancaire par internet reste (encore et toujours) sans réponse positive, ni négative, par diverses banques ;

  • sa demande au guichet d’une banque a donné lieu à un refus catégorique et à une réponse « pas d’ouverture de compte pour la copropriété », bien que celle-ci soit bien inscrite à la Banque Carrefour des Entreprises ;

  • sa demande ailleurs a donné lieu à des réponses telles que « une ouverture de compte pour l’ACP ne serait possible que pour les clients (?! !) » ou « une ouverture de compte n’est possible que pour des personnes (lesquelles ???!).

Dans un autre cas, il a été rapporté qu’en cours d’année, les associations de copropriétaires doivent payer d’importants frais de gestion administrative, sur une base forfaitaire et non modulée selon le nombre des opérations effectuées.

Elles sont alors mises au pied du mur et devant le fait accompli -en tous cas pour l’année en cours-. En cas de refus, elles ont alors le choix pour l’année prochaine : rester ou partir. Elles restent libres de clôturer leurs comptes et de chercher ailleurs, mais, n’est-ce pas passer de Charybde en Scylla, si elles doivent vivre les difficultés évoquées ci-avant ?

Règle

L’article 577-8, § 4, 5° du Code civil (ancien) disposait que « Quels que soient les pouvoirs qui lui sont conférés par le règlement de copropriété, le syndic est chargé …. d’administrer les fonds de l’association des copropriétaires ; dans la mesure du possible, ces fonds doivent être intégralement placés sur divers comptes, dont obligatoirement un compte distinct pour le fonds de roulement et un compte distinct pour le fonds de réserve ; tous ces comptes doivent être ouverts au nom de l’association des copropriétaires. »

Si, dans la mesure du possible, il fallait placer les fonds sur divers comptes, il fallait donc obligatoirement au moins un compte.

En tous cas, tous ces comptes devaient être ouverts au nom de l’association des copropriétaires.

La loi du 18 juin 2018 reprise dans le nouveau Code civil, l’article 3.86, § 3 qui organise l’obligation d’un fonds de réserve, enfonce le clou en disposant que :
« … Ces fonds (de roulement et de réserve) doivent être placés sur divers comptes, dont obligatoirement un compte distinct pour le fonds de roulement et un compte distinct pour le fonds de réserve ; tous ces comptes doivent être ouverts au nom de l’association des copropriétaires.
Le patrimoine de l’association est constitué par des apports périodiques… ».

Le syndic est toujours chargé d’administrer lesdits fonds.

Donc et sans nuances, une association de copropriétaires doit être titulaire de compte(s) (bancaires) à son nom. L’obligation légale est maintenue, mais en outre, il n’est plus question de se retrancher derrière « la mesure du possible ». Ce devoir s’impose aussi bien aux associations de copropriétaires avec personnalité juridique (car leurs statuts sont transcrits dans les registres du bureau compétent de l’Administration générale de la Documentation patrimoniale) qu’aux associations de copropriétaires sans statuts transcrits régies par la loi sur la copropriété.

Après sa nomination par l’assemblée générale, une des premières démarches du syndic est de vérifier que l’ACP dispose bien de comptes et d’effectuer un passage obligé par une institution bancaire, soit pour changer les pouvoirs relatifs au(x) compte(s) bancaire(s) déjà ouvert(s), soit pour ouvrir un ou de nouveaux comptes bancaires au nom de l’ACP.

Plus tard, il n’est pas exclu que l’assemblée générale décide de changer de compte bancaire ou de confier ses fonds à une autre banque, d’autant que ces dernières années, vu les travaux de rénovation, les fonds de réserve prennent de plus en plus d’importance.

Importance de disposer d’un compte bancaire

A ce jour, pour être titulaire d’un compte, comme les mœurs, les usages, la vie économique nous y contraignent comme personnes physiques et comme personnes morales, il faut nécessairement avoir recours au privé et au service des institutions bancaires. Dans ce cadre, les banques sont appelées à remplir une mission d’utilité publique.

Au-delà des considérations liées au droit bancaire et à sa nature, un compte bancaire permet à son titulaire d’une part, de percevoir des sommes de toutes natures telles les fonds périodiques dus par les copropriétaires, des sommes dues par les usagers de parties communes, des subsides alloués par les pouvoirs publics pour le financement de travaux, … et d’autre part, de payer régulièrement des tiers fournisseurs et autres cocontractants.

A cet égard, il n’est pas question de crédit : le service rendu se limite, tout au plus, à percevoir des fonds et donner la possibilité d’effectuer des retraits, par hypothèse de banque à banque.

Il serait dès lors légitime que les frais de gestion administrative soient en rapport et proportionnels avec le service minimal rendu lequel mérite en effet rémunération raisonnable, ce qui n’est pas contesté.

Action du SNPC

Vu les témoignages reçus, le SNPC voudrait objectiver les situations évoquées : s’agirait-il de cas isolés ou bien s’agirait-il d’un mouvement plus général de dissuasion ?

Dans cette dernière hypothèse, faudrait-il paraphraser Shakespeare en se demandant « s’il y a quelque chose …. qui ne tournerait pas rond … au royaume… » ?

Les exigences et les besoins de la vie économique et les impératifs des pouvoirs publics auxquels il faut se conformer requièrent de prendre le problème à bras le corps et d’apporter urgemment une solution équilibrée.


En conséquence...

Copropriétés et Copropriétaires intervenant dans la gestion de votre copropriété, si vous êtes ou avez été confrontés à des difficultés analogues à celles décrites en lien avec votre Banque, faites-le nous savoir, en écrivant à jurid@snpc-nems.be

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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