En région bruxelloise, n’acceptez pas trop vite la succession de votre père ou de votre mère…

Le CRI n°476 - Septembre 2023
En région bruxelloise, n’acceptez pas trop vite la succession de votre père ou de votre mère…

N’acceptez pas trop vite la succession de votre père ou de votre mère, la renonciation en faveur de vos enfants sera fiscalement avantageuse à Bruxelles comme c’est déjà le cas en Flandre.

Bonnes nouvelles pour les successions bruxelloises : le saut de génération sera facilité et l’exonération de l’héritage de la résidence commune entre conjoints et cohabitants officiels sera étendue aux cohabitants de fait depuis 3 ans

Le parlement bruxellois vient d’adopter un projet d’ordonnance qui est comme un message positif pour les épargnants qui résident à Bruxelles.

Cette initiative aura des effets positifs sur l’investissement contrairement aux autres initiatives désastreuses auxquelles les propriétaires doivent faire face à Bruxelles, comme la hausse des taxes, le droit de préemption et le blocage partiel des loyers.

Que prévoit ce projet d’ordonnance bruxelloise ?

Saut de génération en cas de renonciation à succession

Bien que cette modification se soit ajoutée en dernier lieu, c’est probablement la plus importante.

Avant la loi du 10 décembre 2012, la renonciation à succession profitait aux autres héritiers, généralement les frères et sœurs, et pas à ses propres enfants.

L’article 786 du Code civil a dorénavant prévu la renonciation en faveur de sa propre descendance, ce qui est logique car avec l’allongement de l’espérance de vie, les héritiers légaux sont de plus en plus âgés et souhaitent transmettre l’héritage à leurs propres enfants qui en ont plus besoin (*).

Jusqu’à présent, la loi bruxelloise prévoyait que la renonciation ne pouvait avoir pour effet de réduire les droits de succession.

Un exemple permet de comprendre :

Si le défunt possède 600.000 euros au jour de son décès et délaisse sa succession à une fille qui a deux petits-enfants.

En l’absence de renonciation par la fille, les droits de succession seront calculés sur une seule héritière ; ils s’élèveront à 115.375 euros.

(*) voir prop. Ord. de Clippele et Brotchi A – 381/1 du 12.03.2013 qui vise à neutraliser l’impact fiscal d’une renonciation à une succession

Si par contre, elle renonce à la succession de son père en faveur de ses deux enfants, ils seront taxés chacun séparément et devront supporter ensemble 74.750 euros, ce qui procure une économie d’impôts importante de 40.625 euros.

Cela offre également le gros avantage de transmettre les successions à des personnes plus jeunes qui en ont d’avantage besoin.

La Flandre avait déjà adapté sa législation fin 2017. Maintenant c’est au tour de Bruxelles à le faire pour les successions ouvertes à partir du 1er janvier 2024.

La première question qu’un notaire vous posera lors de l’ouverture de la succession est de savoir si vous comptez bien l’accepter ou s’il ne faut pas envisager de renoncer en faveur de vos enfants.

Cohabitation de fait

Après avoir étendu le tarif favorable de taxation des successions entre époux aux cohabitants légaux, c’est-à-dire les couples qui ont fait une déclaration officielle à l’administration communale, le projet prévoit deux extensions :

  1. Les cohabitants de fait depuis 1 an au moins bénéficieront du tarif « ligne directe » taxé de 3 % à 30 % au lieu du tarif entre cousins ou non apparentés qui reste malheureusement toujours parmi les plus élevés au monde (40 % à 80 %).

  2. Les cohabitants de fait depuis 3 ans au moins pourront solliciter la gratuité de l’héritage de leur résidence principale commune, comme c’est déjà le cas pour les couples mariés ou en cohabitation légale.

Force majeure

Il est à noter que la maladie qui a obligé un des « partenaires », c’est-à-dire une des personnes qui est en couple par le mariage ou par la cohabitation, à quitter son domicile est considérée comme un cas de force majeure et permet de continuer à bénéficier du tarif avantageux.

Il est en effet fréquent qu’un des deux partenaires soit obligé de quitter le domicile conjugal pour raison de santé ; les héritiers devront dans ce cas joindre l’attestation d’un médecin qui confirme l’état de santé du défunt, ou du survivant, qui l’a obligé à quitter la résidence commune pour se rendre dans une maison de repos ou de soins.

C’est une grande injustice qui est ainsi réparée.

Nous rencontrons de nombreuses situations où des héritiers proches du défunt ont été amenés à supporter des droits de succession au taux de 80 %.

Le plus courant était celui d’un couple de fait où nombreux sont ceux qui se trouvaient confrontés à un accident de la route ou un décès subit. La succession entre eux était quasiment impossible par une taxation spoliatrice.

Mais il y aussi la situation des frères et sœurs d’une même famille ; prenons l’exemple d’un père qui décède d’un accident le jour-même et l’un des enfants qui était avec lui dans la voiture, le lendemain, à l’hôpital. Cet enfant décédé le lendemain aura hérité de son père durant un jour, pour laisser ensuite sa succession à ses frères et sœurs.

La deuxième succession entre frères et sœurs est actuellement taxée à un taux compris entre 20 % et 65 % ; avec le nouveau projet, ce taux sera réduit à maximum 30 % si les frères et sœurs résident dans la même habitation.

Legs testamentaire à un ami

Le Ministre des finances bruxellois suit également la loi flamande qui réduit la taxation du legs à un ami ou à une aide-ménagère de 40 % à 3 % sur maximum 15.000 euros.

Malheureusement, le projet bruxellois reprend le même piège qu’en Flandre, c’est que le testateur doit indiquer à côté du legs à cette personne que le taux réduit doit lui être réservé, à peine de nullité.

C’est la première fois à notre connaissance que le libellé du testament est de nature à influencer la taxation d’un legs.

Il aurait mieux valu appliquer l’ordonnance à toutes les situations identiques sans tenir compte du fait que le testateur ait pris soin d’utiliser la terminologie exacte.

Alignement des partenaires au même tarif de donation que les conjoints mariés

L’ordonnance aligne le tarif de la « ligne directe » en matière de donations aux couples de fait depuis au moins un an, avec certaines exceptions où la loi impose trois ans de vie commune, comme par exemple la donation d’une entreprise familiale au taux zéro.

Par ailleurs, le tarif des enfants d’accueil ou adoptés passe au tarif des enfants légitimes s’il est démontré que cette personne a vécu au moins un an avec le défunt et reçu les secours et soins que donnent normalement des parents à leurs enfants.

Entrée en vigueur le 1er janvier 2024, mais tout n’est pas résolu.

Reste qu’une difficulté majeure n’est pas rencontrée par le projet d’ordonnance alors qu’elle est à notre avis discriminatoire et se rencontre de plus en plus fréquemment dans nos familles recomposées.

Actuellement, la loi prévoit que le legs testamentaire en faveur des enfants de son époux sont taxés comme s’il s’agissait de ses propres enfants.

La loi n’a pas prévu le cas du prédécès d’un des enfants du conjoint ; si cet enfant décédé a une descendance, la taxation des beaux petits-enfants se fera au taux maximal de 80 %.

Les cas les plus fréquents sont ceux des remariages après un décès ou un divorce ; il est fréquent que le couple remarié cherche à protéger le survivant des conjoints, tout en voulant ne pas déshériter ses enfants.

La loi fiscale l’autorise en faveur des enfants, mais pas en faveur des petits-enfants, même si leur père ou mère est prédécédé.

C’est pour cette raison que les testaments sont faits en faveur des enfants, sans application de la substitution légale en cas de prédécès, sauf en cas de déménagement en Flandre, car la Flandre a supprimé cette discrimination.

Nous espérons que cette discrimination injustifiée disparaîtra bientôt de l’arsenal fiscal bruxellois.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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