Dans l'éditorial du CRI du mois de septembre 2019, nous appelions les bailleurs à la vigilance en Région de Bruxelles-Capitale d'une part et d'autre part à être prêts à se défendre et à soutenir le SNPC dans ses actions.
D'aucuns sont conscients que pour rencontrer les attentes en logement de nos concitoyens, il sera difficile de construire des logements sociaux en suffisance et D'aucuns sont conscients que pour rencontrer les attentes en logement de nos concitoyens, il sera difficile de construire des logements sociaux en suffisance et dès lors rien de tel que de faire main basse sur le logement privé en ne permettant plus aux bailleurs de choisir librement leurs locataires ; en imposant le montant des loyers pouvant être demandés ; en ne permettant plus d'expulsion, même en cas de fautes graves des locataires (dont le non-paiement des loyers), sans relogement et si possible sans indemnisation des bailleurs etc…
Ils veulent procéder à la SOCIALISATION du logement privé et c'est annoncé NOIR SUR BLANC dans le programme de la majorité bruxelloise.
Et nous ne leurrons pas ! Quand, dans l'Echo du 19 février 2020, Madame BEN HAMOU, Secrétaire d'Etat au Logement de la Région de Bruxelles-Capitale insiste sur la nécessité de recourir au privé pour résoudre la crise du logement à Bruxelles, elle ne vise nullement une relation équilibrée et apaisée avec les bailleurs. Elle pense plutôt à des collaborations avec le monde de la construction et de la promotion immobilière dont les intérêts sont loin d'être toujours convergents avec ceux des bailleurs.
Ce que nous avons vécu dans le cadre de la pandémie de coronavirus est révélateur de cet état d'esprit, et du fait qu'ils feront tout pour réduire les droits des bailleurs et aboutir aux objectifs qu'ils se sont fixés et même plus.
Tout d'abord la prolongation de l'interdiction des expulsions jusqu'au 31 août 2020 alors qu'en Wallonie, cette mesure a pris fin le 8 juin et en Flandre le 17 juillet.
Le SNPC n'avait aucun problème à ce que pendant la période de confinement, les expulsions soient suspendues mais au-delà du 8 juin, et alors même que le déconfinement était bien lancé, la situation devenait abusive et ne pouvait qu'aggraver le préjudice des bailleurs concernés.
Certes les loyers continuaient à être dus mais il est de notoriété publique que la plupart des jugements de résiliation de baux trouvent leur origine dans le non-règlement des loyers et dès lors tout mois qui passe ne sera pas non plus honoré… L'expérience montre que les chances de récupération sont souvent nulles.
Nous avons introduit un recours en extrême urgence devant le Conseil d'Etat qui malheureusement n'a pas abouti (l'extrême urgence n'ayant pas été reconnue par le Conseil d'Etat) mais comme nos arguments au fond n'ont pas été examinés, nous avons introduit un nouveau recours (voir notre article en page 12).
Nous allons en outre mobiliser les bailleurs victimes de cette mesure de suspension et envisager avec nos conseils d'assigner en dommages et intérêts la Région de Bruxelles-Capitale.
Ensuite, voulant profiter des circonstances, Madame BEN HAMOU a voulu faire passer sous le couvert des pouvoirs spéciaux des mesures permanentes d'encadrement des loyers (voir complément ci-dessous : "A quelle sauce veulent-ils asservir les bailleurs") et rendre les grilles indicatives des loyers contraignantes. Alors même que le programme de la majorité ne le prévoit pas.
Ils motivaient comme suit cette tentative de coup de force :
"Il est très difficile à l'heure actuelle d'évaluer le nombre exact de personnes concernées mais plus de 1,2 million de travailleurs belges ont d'ores et déjà été mis en chômage temporaire et plus de 300.000 indépendants ont dû arrêter (temporairement) leur activité. Ensemble, cela représente 40 % de la force de travail du secteur privé belge. Appliqués à la Région bruxelloise cela représente 158.040 personnes. Si on applique le pourcentage de locataires sur le marché privé locatif existants en Région bruxelloise qui est de 51%, il peut être admis qu'un minimum de 80.600 bruxellois risquent de rencontrer des difficultés pour payer leur loyer.
Les premiers signes d'une nouvelle crise financière mondiale sont déjà perceptibles et le secteur immobilier se positionne comme valeur refuge. Dans un tel contexte, une nouvelle hausse des loyers est également à craindre.
Pour toutes ces raisons, il s'impose au Gouvernement détenteur des pouvoirs spéciaux de prendre sans délai les mesures annoncées dans la DPR visant à préserver et garantir l'accès au logement abordable des personnes les plus vulnérables.
Il s'agit premièrement de rendre effectif le droit à un logement abordable financièrement tel que consacré par l'article 3 du code bruxellois du logement en introduisant les notions de loyer raisonnable et de loyer abusif ainsi que la possibilité de révision du loyer abusif par le juge de Paix.
Ensuite, d'instituer une commission paritaire locative consultative chargée d'évaluer la justesse des loyers à la demande de toute personne intéressée ou du juge de Paix saisi d'une demande de révision du montant du loyer abusif."
Vers la grève des investissements de ces « cochons payeurs » que sont les bailleurs dans les nouvelles promotions immobilières en Région de Bruxelles-Capitale.
Un effet d'aubaine et il sera dès lors intéressant dans les prochains mois de voir si réellement il y a eu de gros problèmes au niveau du règlement des loyers pendant la période de confinement et indépendamment de cela en rappelant que dans des situations de crise de ce type, il appartient de prioriser ses dépenses : santé, alimentation et logement et d'autant plus cette dernière puisqu'il fallait rester confinés ! Fort heureusement plusieurs partenaires de la majorité bruxelloise pour la forme à tout le moins, mais aussi pour le fond pour certains, s'y sont opposés et dès lors le PS n'a eu d'autre solution que de faire déposer par son groupe parlementaire au Parlement bruxellois une proposition d'ordonnance avec le même contenu. Le Cabinet de la Secrétaire d'Etat au Logement a aussi tenté de faire un forcing au niveau du Conseil Consultatif du Logement de la Région pour qu'il avalise ces mesures dans l'urgence au travers d'une réunion de son bureau en vidéoconférence. Le SNPC a refusé d'y participer sentant l'oignon et s'interroge sur l'opportunité de rester membre d'un Conseil de ce type qui ne sait pas assurer son indépendance. Il a déjà démissionné du bureau.
L'avenir nous dira si une majorité parlementaire existe pour faire passer de telles dispositions mais en tout état de cause si tel était le cas, le SNPC, comme il l'a fait dans le cadre du saut d'index en Région wallonne, introduira un recours en annulation contre. Il serait indiqué dans le chef des Autorités bruxelloises qu'elles relisent et s'imprègnent de la jurisprudence récente de la Cour Constitutionnelle sur l'équilibre à assurer entre les droits et obligations des bailleurs et des locataires
En tout état de cause, tant le SNPC que les bailleurs doivent fourbir « leurs armes ». Tel sera bien entendu le cas via tous les recours juridiques possibles mais les bailleurs doivent aussi s'apprêter en Région de Bruxelles-Capitale à faire la grève des investissements immobiliers mais aussi en termes de travaux de rénovation et autres s'ils ne sont pas nécessaires. Les bailleurs ne doivent pas oublier par exemple qu'ils sont les consommateurs finaux (en d'autres termes les payeurs) de toute nouvelle promotion immobilière.
A quelle sauce veulent-ils asservir les bailleurs ?
Comme nous l'avons déjà précisé, il s'agissait d'inclure dans le Code bruxellois du Logement au travers d'un arrêté de pouvoirs spéciaux les notions et mesures suivantes.
A l'article 2, les points suivants sont insérés :
36° Loyer raisonnable : le loyer d'une habitation qui correspond aux références de la grille indicative des loyers ou dont la différence est justifiée par les caractéristiques propres du logement ou de son environnement
37° Loyer abusif : est abusif le loyer portant sur une habitation qui :
est égal ou dépasse de plus de 10% les références de la grille indicative des loyers sans que cette différence ne soit justifiée par les caractéristiques propres du logement ou de son environnement immédiat au moment de la conclusion du contrat de bail ;
correspond aux références de la grille indicative des loyers mais dont le logement accuse un manquement grave aux normes de qualité et de salubrité en vigueur.
Article 224 :
§1- Le bailleur est tenu de proposer un loyer raisonnable eu égard aux caractéristiques du bien loué.
§2- A la demande du locataire, le juge peut à tout moment réviser un loyer abusif.
§3- Le juge saisi d'une demande de révision en vertu du paragraphe 1 peut solliciter l'avis de la commission paritaire locative visée à l'article 107/1 du code.
Article 107/1 : Il est institué au sein du Conseil consultatif du Logement une commission paritaire locative compétente pour évaluer le montant du loyer et son caractère abusif ou raisonnable pour toute habitation située en Région bruxelloise. Lorsqu'elle conclut au caractère abusif du loyer, la commission paritaire propose aux parties une conciliation limitée au montant du loyer. Les avis de la commission sont consultatifs et non contraignants.
Article 107/2 : La commission paritaire locative peut être saisie par toute personne intéressée et par le juge de Paix saisi d'une demande en vertu de l'article 224 du Code. Le recours à la commission paritaire locative est gratuit.
Les principales remarques du SNPC sont les suivantes :
Dans quel état démocratique vit-on pour tenter par voie d'un arrêté de modifier une législation votée par une assemblée parlementaire en l'occurrence le Parlement bruxellois ?!
Comment vouloir sanctionner des dépassements de grilles des loyers alors qu'elles sont indicatives sans compter que dans sa déclaration de politique générale, l'actuelle majorité bruxelloise admet que les grilles indicatives actuelles sont imparfaites et pas suffisamment objectives en regard par exemple de toutes les caractéristiques propres aux biens donné en location. Le SNPC l'a d'ailleurs démontré dans une étude à leur sujet.
Permettre de revoir le montant du loyer fixé au bail, fruit de la négociation entre les parties, c'est une remise en cause fondamentale de la liberté contractuelle.
D'ores et déjà aujourd'hui, il existe des mécanismes permettant de lutter contre les loyers abusifs et notamment au travers de la théorie des troubles de jouissance largement mise en œuvre par les Juge de Paix.
Le SNPC ne veut pas des commissions paritaires locatives que d'aucuns voudraient voir ériger en tribunaux populaires et le SNPC ne s'y associera pas.
Il est évident qu'avec des dispositions de ce type, tous les locataires risquent de contester leurs loyers et cela va multiplier les contentieux locatifs.
Des mesures de ce type ne peuvent que faire fuir les particuliers de l'investissement locatif privé, et engendrer une raréfaction de l'offre de logements et une augmentation des loyers.
Enfin, mesures à sens unique car il n'est pas envisagé l'hypothèse où le loyer serait trop bas par rapport aux grilles et permettre dès lors son augmentation. Il est déraisonnable qu'un bailleur ne puisse percevoir le juste loyer pour lui permettre de faire face à ses charges et d'en tirer un revenu raisonnable.