Un article du mois de décembre présentait brièvement le Facilitateur CoBrACE et le SNPC organisait un webinaire sur ce thème. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
Présentation générale du CoBrACE
Le Code bruxellois de l’Air, du Climat et de la maîtrise de l’Energie, CoBrACE, adopté en Région bruxelloise le 2 mai 2013, a été publié au Moniteur belge le 21 mai 2013. Il a depuis lors été étoffé par de multiples ordonnances dont récemment celles du 3/5/2018, 19/3/2020, 18/12/2020, 17/6/2021, cette énumération étant non-limitative.
Ses objectifs et ses implications au niveau social et économique et les publics concernés requièrent que nous lui accordions une grande attention.
En effet, parmi les objectifs déclarés, nous y trouvons l’intégration des politiques régionales de l’air, du climat et de l’énergie, la promotion de l’utilisation rationnelle de l’énergie, l’amélioration de la performance énergétique et du climat intérieur des bâtiments, la diminution des impacts environnementaux résultant des besoins en mobilité ou l’évaluation et l’amélioration de la qualité de l’air ambiant afin de prévenir et réduire les effets nocifs pour la santé et l’environnement, la réduction des gaz à effet de serre …
A cet effet, il transpose, parfois partiellement, diverses Directives européennes dont celles 2010/31/UE, 2003/87/CE, 2012/27/UE ou (UE) 2018/2001, …
Le Code affirme ainsi qu’en 2050, les émissions directes de gaz à effet de serre sont réduites d’au moins 90% par rapport à 2005 pour atteindre la neutralité carbone ; comme d’ailleurs, elles sont réduites d’au moins 40% en 2030 et d’au moins 67% en 2040 par rapport à 2005.
Il appartient à Bruxelles-Environnement de proposer au Gouvernement (bruxellois) un cadre méthodologique de réduction des émissions indirectes de gaz à effet de serre. Ce cadre permettra à celui-ci d’une part, de baser sa politique régionale de réduction de ces émissions et d’autre part, d’élaborer une stratégie à long terme à 30 ans pour préciser la répartition sectorielle des objectifs de réduction des gaz à effet de serre directes et indirectes. Le plan régional Air-Climat-Energie s’inscrit dans le Plan Régional de Développement durable qui sera adopté par le Gouvernement au plus tard le 30/3/2023, ensuite en 2027 et par la suite, tous les 5 ans. Le plan sera soumis à une évaluation environnementale.
Il est opportun de retenir que les mesures sectorielles du CoBrACE visent aussi bien les bâtiments (sur le plan du PEB), que les transports, les professionnels et les entreprises et l’exemplarité des pouvoirs publics.
La présentation du Facilitateur et le Webinaire portaient sur les mesures sectorielles spécifiques aux transports.
Dispositions relatives aux transports
Pour rappel, l’objectif du CoBrACE est de réduire les gaz à effet de serre et de maîtriser la consommation énergétique.
Il tend à améliorer la mobilité, l’environnement, la qualité de l’air et de vie tant sur le chemin du site où s’exerce l’activité qu’à ses abords et dans son voisinage. Il veut aussi diminuer l’impact des activités en assurant un juste équilibre de répartition modale.
Il vise les plans de déplacements scolaires et les plans de déplacements d’entreprise et d’activités.
En conséquence, il s’agit, par la porte ou par la fenêtre, de changer les habitudes de déplacement des travailleurs et des visiteurs en vue d’augmenter les déplacements à pied, en vélo ou en transports en commun, de rationaliser l’usage de la voiture individuelle et de diminuer le nombre de voitures à proximité du site où s’exerce l’activité, en favorisant d’autres modes de déplacement.
A cet effet, le Code « s’attaque » au stationnement hors voirie.
Champ d’application du volet « Stationnement hors voirie »
La règlementation s’applique aux parkings à créer et aux parkings existants en RBC (comportant au minimum 3 emplacements excédentaires). Ceux-ci requièrent en tous cas une demande de permis d’environnement au sens de l’ordonnance du 5/6/1997 relative aux permis d’environnement, une demande de certificat d’environnement au sens de l’article 8 de cette ordonnance ou une demande de prolongation d’un permis d’environnement au sens de l’article 62 de l’ordonnance.
Sont donc visés les lieux de stationnement hors voirie pour des véhicules automobiles de 2 à 4 roues dont l’accès est limité à certains utilisateurs, par opposition au parking public.
Sont expressément exclus de l’application du CoBrACE :
les emplacements de parcage destinés à des fonctions de logement,
les emplacements de parcage affectés à des fonctions de parking public,
les emplacements de parcage exclusivement affectés aux activités artisanales, industrielles logistiques, d’entreposage ou de production de services matériels, aux commerces, aux commerces de gros, aux grands commerces spécialisés, aux équipements d’intérêt collectif ou de service public, aux établissements hôteliers.
Même si le terme « Bureau » n’est pas expressément usité dans ces dispositions, la règlementation s’applique donc aux immeubles qui remplissement une fonction de bureau et à leurs propriétaires, alors que par ailleurs, souvent ces immeubles sont occupés par des entreprises locataires.
Selon Bruxelles-Environnement, c’est toujours l’utilisation finale des emplacements qui détermine si oui ou non, il est soumis au CoBrACE. Toutes les places de parking des immeubles de bureaux situées hors voirie sont concernées ainsi que les emplacements loués par des bureaux dans un immeuble voisin même si l’affectation de l’immeuble voisin n’est pas soumise au CoBrACE.
Nombre d’emplacements de parcage autorisé versus nombre d’emplacements de parcage excédentaire
Pour déterminer le nombre autorisé d’emplacements dans un parking lors du renouvellement du permis d’environnement, deux paramètres sont retenus :
la zone d’accessibilité dans laquelle se situe l’immeuble ou la partie d’immeuble qui est destinée à desservir l’installation pour laquelle le permis ou le certificat d’environnement est sollicité,
la superficie de plancher de (bureaux) de cet immeuble.
La zone d’accessibilité par les transports en commun résulte d’une division du territoire régional en trois zones : A (très bien desservie), B (bien desservie) ou C (moyennement desservie) et se détermine en fonction de la distance pédestre à parcourir entre l’accès au parking et les gares et autres arrêts.
Le nombre maximum des emplacements de parcage accessoires à l’immeuble ou partie d’immeuble tient compte de la zone d’accessibilité :
en zone A, 2 emplacements pour 250 m² de superficie plancher et 1 emplacement de parcage par tranche supplémentaire de 200 m² de superficie plancher,
en zone B, 1 emplacement pour 100 m²,
en zone C, 1 emplacement par tranche de 60 m² de superficie plancher
Le calcul des surfaces de plancher est déterminé par la totalité des planchers mis à couvert et offrant une hauteur libre d’au moins 2,20 m dans tous les locaux, à l’exclusion des locaux destinés au parcage et des locaux situés sous le niveau du sol qui sont destinés aux caves, aux équipements techniques et aux dépôts.
Pour calculer le quota CoBrACE, soit le nombre d’emplacements de parcage admis, une feuille de calcul est disponible à cet effet sur le site de Bruxelles-Environnement. Le nombre d’emplacements de parcage excédentaire est ainsi déterminé compte tenu de la demande d’emplacements visée dans le permis d’environnement,
Que faire des emplacements excédentaires, pourtant valablement acquis par leurs propriétaires ?
Diverses options s’offrent aux propriétaires de ces parkings, acquis en toute bonne foi :
la reconversion des emplacements auto et leur réaffectation à d’autres usages, par exemple, en parcage de vélos, de motos, de carpooling et carsharing, zones de livraison, bornes de recharges, …
l’ouverture des emplacements au grand public ou leur ouverture à un public restreint, sous forme d’abonnements, aux riverains par exemple, tout en s’assurant que ces abonnements ne seront pas contractés par des employés de bureaux …
le paiement de la charge environnementale X en fonction de la zone d’accessibilité, indexée annuellement, avec une majoration de 10% par année de maintien des places excédentaires.
une demande de dérogation, motivée par la nécessité de disposer d’emplacements supplémentaires pour des véhicules fonctionnels, pour des visiteurs/clients, par des nécessités économiques ou sociales propres à l’activité envisagée dans l’immeuble que dessert le parking ou par une accessibilité réduite spécifique.
Le CoBrACE semble en tous cas muet quant au sort des propriétaires des emplacements qualifiés d’excédentaires.
Le rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement
En cas de demande de dérogations, un rapport d’évaluation des incidences sur l’environnement doit être réalisé par un bureau d’études agréé pour les parkings comportant plus de 10 places excédentaires, sur base d’un modèle disponible en ligne sur le site de Bruxelles-Environnement.
De même, le demandeur d’un permis d’environnement qui sollicite une dérogation au CoBrACE, pour une capacité excédentaire limitée de 3 à 10 places, doit également joindre un rapport d’évaluation des incidences qu’il aura rédigé seul.
Et quid des parkings dans les immeubles mixtes en copropriété ?
La mixité des fonctions au sein d’un même immeuble en copropriété, à savoir les logements, les bureaux, les commerces, les emplacements des parkings est chose courante. Des propriétaires de bureaux côtoient des copropriétaires de locaux commerciaux et des copropriétaires de logements.
Tous sont propriétaires de millièmes ou de dix-millièmes ou davantage dans des parties communes générales et éventuellement spéciales et contribuent de même, ou selon des critères d’utilité spécialement adoptés aux dépenses affectant les parties communes générales et/ou éventuellement spéciales.
Le CoBrACE fait fi de ces considérations propres à la vie en copropriété, visant strictement à « dissuader les travailleurs de prendre la voiture pour effectuer leurs déplacements domicile-travail ».
Cet objectif CoBrACE dans un immeuble comportant une partie « Bureaux » impacte manifestement non seulement les droits des copropriétaires des emplacements de parcage hors voirie mais également les droits des autres copropriétaires.
Vu l’existence de la fonction « Bureaux » au sein de la copropriété, les copropriétaires d’emplacements de parcage sont d’office impactés dès lors que des emplacements excédentaires apparaissent. Non seulement, leur droit de propriété est mis à mal mais en outre, la jouissance desdits lots pose question.
La réaffectation à d’autres usages ? En assemblée générale, la réaffectation impose une décision à la majorité des 4/5èmes des voix, et par voie de conséquence, la prise en charge des frais pour un acte de base modificatif. Un parking de vélos, de motos, du carpooling ou carsharing modifie aussi considérablement l’usage et la fréquentation voire l’aspect des parties communes et des aires de manœuvre et nécessite des décisions à la majorité des 2/3 des voix des copropriétaires présents et représentés. Que dire alors d’une proposition comme celle d’installer une champignonnière ou un élevage d’insectes qui change complètement la destination « parcage » du parking…. Une transformation en salle de sports, d’archivage ou en salle de douches des emplacements de parcage imposerait en outre des travaux aux parties communes sans doute considérables.
La transformation en parking public ? Elle est de nature à imposer à tout l’immeuble et à tous les copropriétaires, toutes fonctions confondues, des frais nouveaux et imprévisibles de gestion et des dépenses dans la prise de mesures techniques complémentaires importantes : pour ne citer en exemple que la ventilation, les accès et issues de secours, les dispositifs anti-incendie et anti-pollution de l’air, l’éclairage…. , avec des conséquences lourdes sur le plan de la couverture assurance et des mesures de sécurité à prendre pour les autres occupants de la copropriété.
Reste évidemment le paiement de la charge environnementale. Cette charge pèse également lourdement sur ces copropriétaires d’emplacements de parcage alors qu’ils avaient investi de bonne foi et compté sur des possibilités aisées de location donnant lieu à un petit revenu récurrent…
En conclusion : la question des emplacements excédentaires se pose inévitablement en assemblée générale.
Pour l’aborder, le syndic prudent doit avoir une bonne connaissance des activités sur le site et des besoins de chaque activité. Il doit aussi avoir une vision claire sur les emplacements de stationnement, leur répartition et leur affectation. Pour ce faire, il doit mener préalablement des enquêtes sans doute intrusives auprès des copropriétaires.
Il doit pouvoir présenter les différentes options disponibles ainsi que les conséquences juridiques et financières pour chacune d’elles. Eventuellement, à cette fin, se faire assister, pourquoi pas, par le facilitateur, pour guider, au mieux l’assemblée générale dans ses choix, tout en gardant à l’esprit que cette intervention ne préjuge en rien la décision finale de l’administration, de l’assemblée générale ou des copropriétaires individuellement lésés par des décisions considérées comme abusives.
CONSEIL
Quelles sont les bonnes questions à se poser quand on est déjà propriétaire ou qu’on veut acquérir un emplacement de parking ? Suivez le facilitateur :
a. Quelles sont les activités présentes sur le site ? Sont-elles soumises au CoBrACE ?
b. Quelle est la superficie totale occupée par les activités soumises au CoBrACE ?
c. Dans quelle zone d’accessibilité se trouve l’immeuble ?
d. Quel est le quota CoBrACE ? Quel est le nombre total d’emplacements de parcage sur le site ? Combien d’emplacements sont excédentaires ?
e. Y a-t-il dans l’immeuble des activités soumises au CoBrACE qui ont des besoins spécifiques justifiant des besoins supplémentaires en emplacements et donnant lieu à des dérogations ?