" Comment, Maître, ne pourrais-je pas récupérer ce que mon ancien locataire me doit alors qu'il a été condamné par le juge de paix ? "
Nous avons déjà évoqué dans ces colonnes la nécessité pour un propriétaire-bailleur de choisir un bon locataire.
Nous avons rappelé à cette occasion qu’il est bien difficile pour un propriétaire de se renseigner au sujet d'un nouveau locataire.
Nous nous contenterons, dès lors, de rappeler que même si un propriétaire peut, en principe, choisir son locataire, il ne peut, à cette occasion, faire preuve de discrimination notamment sur l'origine des revenus ni, bien entendu, sur l'origine tout court, l'orientation sexuelle et, de façon plus générale, sur la façon de vivre d'un candidat.
Nul n'est, d'ailleurs, à l'abri d'un accident de vie, notamment perte de travail, séparation d'avec un conjoint, maladie, etc.
Nous ne reviendrons dès lors pas sur ces questions mais, par contre, nous envisagerons de façon sommaire les raisons pour lesquelles la créance d'un bailleur à l'égard de son ancien locataire, même si elle a été confirmée par un jugement définitif, peut ne pas être récupérée.
En gros, il y a des circonstances qui font qu'une créance ne sera pas récupérable ou ne le sera qu'en partie.
De façon à préserver la dignité humaine, la loi a instauré, depuis bien longtemps déjà, la procédure de règlement collectif de dettes que toute personne endettée peut déposer devant le tribunal du travail.
En très résumé, la personne endettée ou le ménage qui l'est, fait l'inventaire de ses dettes et dépose une requête auprès du tribunal, avec ou sans l'aide d'un avocat ou d'un service spécialisé. Elle explique les raisons pour lesquelles elle ne peut pas, ou pas entièrement, payer ses dettes. Si la procédure est respectée, le tribunal rend un jugement recevant la demande et parfois accorde une remise totale de dettes ou prévoit un plan de remboursement pendant une durée qui ne dépasse pas 7 années.
Le tribunal nomme également un médiateur de dettes, généralement un avocat, qui recueillera les revenus de l'endetté, lui versera ce qu'il lui faut à lui et son éventuelle famille pour vivre et paiera aux créanciers, suivant le cas, tout ou partie de leurs créances.
Dans de nombreux cas, rien ne pourra être réparti ou des montants très faibles.
Si le débiteur respecte le jugement ou ne peut le respecter pour des raisons considérées comme valables par le juge, il sera alors dispensé du remboursement du solde qu'il doit et les créanciers devront s'en contenter, la créance étant ensuite considérée comme éteinte.
Dans tous les autres cas, et sans l'intervention d'un tribunal dans le cadre de la procédure de règlement collectif de dettes, le créancier ou son avocat constatera que le débiteur fait déjà l'objet de saisies d'un mobilier qui "ne vaut rien" ou, en tous les cas, ne vaut pas la peine d'être vendu.
Donc, même s'il a été saisi, il ne sera pas proposé à la vente publique. Par conséquent, cela ne sert à rien, pour un créancier, de s'acharner à poursuivre un débiteur mobilièrement insolvable.
Il faut notamment savoir qu'une voiture d'un certain âge ne vaut absolument rien sur le marché de la vente forcée, pas plus qu'un mobilier courant.
Les salaires et revenus de remplacement ne peuvent être saisis en dehors des montants indexés chaque année (rien en-dessous de 1.341,00 € nets par mois mais tout à partir de 1.738,00 €).
De plus, les frais de justice à exposer, même s'ils bénéficient d'un privilège, sont rarement récupérables. Il faut savoir que ces derniers peuvent s'avérer très élevés et que c'est le créancier qui doit les avancer à l'huissier de justice qu'il a chargé de poursuivre le débiteur.
Dès lors, dans de très nombreux cas, si pas dans la majorité de ceux-ci, le créancier doit faire une croix sur ce qui lui est dû et ne pas s'acharner faute d'accroître considérablement le montant de ce qui lui est dû.
Souvent, les personnes endettées s'arrangent pour ne rien avoir au soleil et pour ne pas pouvoir être utilement saisis.
Certes, le Code pénal prévoit le délit d'organisation d'insolvabilité mais c'est une circonstance extrêmement difficile à prouver et il faut bien dire que ce n'est pas la priorité des Parquets du Procureur du Roi qui ont d'autres chats à fouetter.
Les poursuites sont rares et les condamnations le sont encore plus.
Bien sûr, il faut examiner cas par cas mais surtout faire confiance aux professionnels, huissiers et avocats