Chaque copropriété ne dispose pas d’un conseil de copropriété. Est-il nécessaire et obligatoire ? Quelles sont sa mission et ses compétences ?
Partons des seuls textes faisant état des compétences du Conseil de Copropriété reconnues par notre législateur
Dans notre loi sur la copropriété, nous pouvons préalablement comparer le nombre de paragraphes, consacrés, d’une part, à l’Assemblée Générale et au syndic et, d’autre part, au Conseil de Copropriété.
Force sera de constater que ce qui est repris à l’article 3.90, portant sur le Conseil de Copropriété est non seulement « fort court » mais aussi exprimé de manière très générale.
Avant tout développement, reprenons tels quels ces textes :
« Art. 3.90. Conseil de copropriété
§ 1er - Dans tout immeuble ou groupe d'immeubles d'au moins vingt lots à l'exclusion des caves, garages et parkings, un conseil de copropriété est constitué par la première assemblée générale.
Ce conseil, dont peuvent être membre les titulaires d'un droit réel disposant d'un droit de vote à l'assemblée générale, est chargé de veiller à la bonne exécution par le syndic de ses missions, sans préjudice de l'article 3.91.
Dans l'attente de la création et de la composition du conseil de copropriété obligatoire, tout membre de l'assemblée générale peut introduire une action en justice contre l'association des copropriétaires afin de faire désigner un ou plusieurs copropriétaires ou, aux frais de l'association des copropriétaires, un tiers exerçant les missions du conseil de copropriété.
§ 2 - Dans les immeubles ou groupes d'immeubles de moins de vingt lots, à l'exclusion des caves, garages et parkings, l'assemblée générale peut décider de constituer un conseil de copropriété, composé de la même manière et chargé des mêmes missions qu'au paragraphe 1er.
§ 3 - L'assemblée générale décide de la nomination des membres du conseil de copropriété à la majorité absolue, pour chaque membre séparément.
Le mandat des membres du conseil de copropriété dure jusqu'à la prochaine assemblée générale ordinaire et est renouvelable.
§ 4 - Pour exercer sa mission, le conseil de copropriété peut prendre connaissance et copie, après en avoir avisé le syndic, de toutes pièces ou documents se rapportant à la gestion de ce dernier ou intéressant la copropriété.
Il peut recevoir toute autre mission ou délégation de compétences sur décision de l'assemblée générale prise à une majorité des deux tiers des voix sous réserve des compétences légales du syndic, de l'assemblée générale et du commissaire aux comptes.
Une mission ou une délégation de compétences de l'assemblée générale ne peut porter que sur des actes expressément déterminés et n'est valable que pour une année.
Lors de l'assemblée générale ordinaire, le conseil de copropriété adresse aux copropriétaires un rapport annuel circonstancié sur l'exercice de sa mission ».
Nous pouvons commenter ces quelques articles avant d’émettre diverses suggestions pour que le Conseil de Copropriété puisse effectivement exercer un rôle qui nous apparaît déterminant.
L’article 3.90 §1 relève que le Conseil de Copropriété « est chargé de veiller à la bonne exécution par le syndic de ses missions sans interférer sur celles liées à la mission du Commissaire aux comptes (article 3.91) qui contrôle les comptes de l’Association des Copropriétaires ».
Mais cela ne signifie pas, pour nous, que les membres du Conseil de Copropriété ne peuvent pas aussi exercer ce contrôle déterminant des comptes.
Il ne doit donc pas se borner à vérifier si le syndic exécute ce qu’a décidé l’Assemblée Générale.
Sa mission d’investigation peut être plus large et il nous apparaît même devoir l’être.
Cela est d’autant moins contestable que, sous l’article 3.89 consacré à la mission du syndic, il est relevé, au paragraphe 5, 9° que le syndic doit « permettre aux copropriétaires d’avoir accès à tous les documents ou informations à caractère non privé relatifs à la Copropriété, de toutes les manières définies dans le Règlement d’Ordre Intérieur ou par l’Assemblée Générale ».
Si le syndic doit laisser « accès » à de tels documents pour tous les copropriétaires, à fortiori, il doit être permis au Conseil de Copropriété d’effectuer aussi toute vérification nécessaire.
Il est relevé aussi, dans le paragraphe 1er de l’article 3.90, la possibilité pour un seul membre de l’Assemblée Générale (donc tout membre) d’introduire une action contre l’A.C.P. dans l’attente de la création de la composition du Conseil de Copropriété afin de faire désigner, s’il y a lieu, un tiers exerçant les missions du Conseil de Copropriété.
La désignation d’un tiers serait la résultante d’une réelle inertie au sein de l’Assemblée Générale ou d’une suspicion liée à la présentation de candidats « trop proches » du syndic, ou peut être à la crainte de voir ce Conseil de Copropriété, pour le contrôle du syndic, ne pas avoir la distance suffisante à son égard.
L’article 3.90 §2 reconnaît à l’Assemblée Générale le pouvoir de décider de constituer un Conseil de Copropriété même pour un immeuble ou groupe d’immeubles de moins de 20 lots (à l’exclusion des caves, garages et parkings).
Ce minimum de 20 lots qui, comme le précise l’article 3.90 §1er requiert ou rend nécessaire et obligatoire l’existence d’un Conseil de Copropriété, nous apparaît être un minimum trop élevé.
En effet, le contrôle de la bonne exécution par le syndic de ces missions s’impose aussi lorsqu’il y a moins de lots.
Si l’on peut concevoir, dans une petite Copropriété, de l’ordre de 5 lots, qu’une telle mission peut s’exercer « en direct », pour notre part, nous considérons que ce contrôle se justifie dès que l’on approche du nombre de 10 lots.
Ainsi, l’Assemblée Générale serait bien inspirée si, sur base de l’article 3.90 §2, elle fait le choix, même si la Copropriété a moins de 20 lots, de décider d’un Conseil de Copropriété.
Le mode de nomination des membres du Conseil de Copropriété prévu à l’article 3.90 § 3 à la majorité absolue pour chaque membre séparément, ne devrait poser guère de difficultés
Toutefois, il importe que la présentation faite pour participer à ce Conseil soit faite en fonction des qualifications de celui qui brigue ce poste.
Surtout dans les grandes Copropriétés, ne serait-il pas sage de voir ce mandat briguer par des personnes ayant une connaissance des mécanismes comptables ?
En août 2012, le plan comptable des Associations des Copropriétaires a été publié au Moniteur Belge.
Ce plan comptable normalisé s’applique à toute Copropriété, sauf à celles qui comportent moins de 20 lots, à l’exclusion des caves, des garages et des parkings.
Ces Copropriétés « plus petites » sont autorisées à tenir une comptabilité simplifiée.
La nature de la comptabilité, qui doit être tenue, dépend par conséquent de la taille de l’Association des Copropriétaires et ainsi de l’ampleur des flux financiers gérés par ces Associations.
Le plan comptable est normalisé, élaboré par Arrêté Royal en étroite collaboration avec la Commission des Normes comptables, et est adapté à la nature des Associations des Copropriétaires. Il assure, conformément à la volonté du législateur, la tenue d’une comptabilité uniforme, transparente et accessible aux copropriétaires.
Certes, c’est bien naturellement le Commissaire aux Comptes qui, impérativement, doit être doté des compétences utiles.
Mais, comme précisé supra, l’importance de comptes transparents justifie pleinement que ne soient pas exclus d’un contrôle possible les membres du Conseil de Copropriété.
Enfin, la question de la délégation de compétences réglée par l’article 3.90 § 4 peut poser question.
Le texte, tel que libellé, rend certes possible cette délégation après vote à une majorité des 2/3 des voix mais apparaît restreindre néanmoins le champ de compétence susceptible de faire l’objet d’une délégation puisqu’il est relevé « sous réserve des compétences légales du syndic, de l’Assemblée Générale et du Commissaire aux Comptes ».
Cette réserve émise était-elle nécessaire à partir du moment où l’Assemblée Générale, souveraine, décide que ce qui était normalement dans le champ de compétence du syndic ou du Commissaire aux Comptes, glisse dans celui du Conseil de Copropriété ?
Pour illustrer ce point, nous parlerons d’un exemple hélas fréquent, celui des infiltrations à partir de terrasses
Il peut être considéré que les travaux à réaliser sont de nature conservatoire car, même s’il doit être refait une assisse complète pour éviter la détérioration de l’étage inférieur, il n’en reste pas moins que laisser la situation en l’état va entraîner la détérioration de parties communes et que, partant, une décision de conservation très rapide s’impose.
Sur cette base, le syndic pourrait agir seul selon l’article 3.89 § 5,2°.
Cette décision peut être budgétairement assez lourde pour la Copropriété et, selon l’interprétation à donner à la nature des travaux, il pourrait être considéré que c’est de la compétence de l’AG (article 3.88 §1er, 1.b).
Mais il est important, vu l’urgence, d’essayer d’éviter la nécessité d’une convocation préalable d’une Assemblée Générale à cause des formalités et des délais utiles à respecter.
Il est aussi sage, vu l’importance vraisemblable de la dépense, mais aussi la discussion possible qui serait liée à la nature des travaux (uniquement conservatoires rendant le syndic seul compétent ou non) de permettre une prise de décision par un organe collégial qu’est le Conseil de Copropriété et qui « déciderait ».
Il faut alors qu’il soit nanti d’une mission dûment déléguée pour réunir les devis et ce, même si c’est le syndic représentant l’A.C.P. qui signera in fine le contrat avec le professionnel choisi pour la réparation.
Le syndic sera « couvert », puisqu’un organe collégial, choisi par l’A.C.P., a permis la prise de décision.
Celle-ci fera l’objet d’un rapport ultérieur à l’Assemblée Générale.
Mais le législateur semble s’être montré quelque peu méfiant face à ce mécanisme de délégation de compétences puisqu’il s’empresse de préciser que, s’il est possible, il n’est valable que pour une année.
Cette méfiance à l’égard du conseil de copropriété, il l’a aussi exprimée dans les missions légales dévolues au syndic puisque, sous l’article 3.89 §6, il relève :
« Il (le syndic) ne peut déléguer ses pouvoirs sans l’accord de l’Assemblée Générale et seulement pour une durée ou à des fins déterminées ».
Fallait-il montrer autant de réticences alors que le mandat des membres du Conseil de Copropriété est remis en cause annuellement et qu’une mauvaise approche de celui-ci peut être ainsi sanctionnée par une absence de renouvellement (comme celui du Commissaire aux comptes et aussi du syndic) ?
Et l’Assemblée Générale peut aussi faire choix de mettre fin à tout moment à cette délégation de mission.
D’accord pour considérer que le syndic doit rester « le moteur » de l’A.C.P. mais ses compétences, d’ailleurs longuement décrites dans la loi sur la Copropriété (avec les responsabilités liées à celle-ci) sont telles que, si l’on veut une Copropriété harmonieuse avec des pouvoirs équilibrés et aussi utilement contrôlés, il nous apparaît qu’il faut donner à ce Conseil de Copropriété une importance plus grande que celle limitée dans les textes.
Et cette importance, elle peut être octroyée par le biais d’une délégation de compétences donnée par l’Assemblée Générale, fusse-t-elle susceptible « de rogner » quelque peu celle du syndic.
Celui-ci, d’ailleurs conforté (voir l’exemple supra) par les choix du Conseil de Copropriété, serait plus à l’aise pour la prise de certaines décisions et la copropriété serait gérée de manière plus consensuelle et plus démocratique.