Location immobilière et poids des impôts

Le CRI n°455 - Juin 2021
Location immobilière et poids des impôts

Le régime de taxation d'un propriétaire privé reste étroitement lié au type de location qu'il a réalisé.

1. Le supplément du Journal L'Echo de novembre 2020 a relevé que la crise du Coronavirus et le confinement n'ont pas complètement bouleversé le marché de l'immobilier résidentiel. Ce secteur reste une valeur refuge mais avec de nouvelles considérations liées à une évolution du mode de travail dont cette notion de « télétravail ». La presse a évoqué à de nombreuses reprises l'augmentation du nombre d'actes de cession de résidences secondaires, également comme conséquence du confinement actuel.

Par contre, en parallèle le marché de l'immobilier « professionnel » a subi et subira des dommages consécutifs à cette situation sanitaire et aux drames civils et sociaux qui en ont déjà découlé. Le phénomène du télétravail aura vraisemblablement des conséquences beaucoup plus longues dans le temps d'abord forcément en « surfaces bureaux » mais engendrant des conséquences indirectes pour les commerces y attenant, notamment ceux relevant du secteur Horeca.

Les critiques excessives lors de débats parlementaires à charge d'investisseurs dans le secteur immobilier font l'impasse de l'importance économique et sociale. Ainsi, et à titre exemplatif, en Région bruxelloise, 60% des ménages sont locataires1.

Le phénomène de régionalisation civile pour le « bail de logement », n'est pas limité à la notion de « bail de résidence principale», mais aussi des logements qualifiés de temporaires en raison de leur durée propre (chambres d'étudiants, résidences secondaires, phénomènes Airbnb).

Cette régionalisation civile n'a pas, actuellement, de conséquence en matière d'impôt sur le revenu, à l'exception du précompte immobilier.

2. Le régime de taxation d'un propriétaire personne physique reste, actuellement, lié à un régime forfaitaire pour autant que le contrat de bail vise une « habitation » affectée comme telle par le, ou les locataires, personne physique.

La base imposable pour ce propriétaire personne physique reste le « revenu cadastral », soit le revenu moyen normal net d'une année, sur base des valeurs locatives de 1975. L'absence des péréquations cadastrales en raison principalement du coût budgétaire, du nombre de fonctionnaires maîtrisant la matière (dont les règles de procédure), sont les obstacles forcément connus mais non affrontés depuis 1990. (La dernière péréquation remontant à 1980)

L'inflation que l'économie a connue de 1976 à 1984 a nécessité des lois temporaires quasi annuelles pour éviter des surcroîts de dérapages budgétaires.

Ces mêmes mesures d'encadrement ont eu des conséquences financières favorables pour le locataire, en raison des limitations légales d'augmentation des loyers.

Par contre, cette différence d'indexation et la suppression de l'imputation des précomptes immobiliers ont entraîné une progression de la taxation des loyers plus rapide que l'évolution de l'indice des prix à la consommation. C'était le but inavoué ou inavouable au plan politique.

L'Administration générale de la Documentation patrimoniale veille au respect des obligations légales d'information à communiquer de manière spontanée par les propriétaires de l'achèvement des travaux de modification d'un immeuble bâti. Cette information doit être réalisée « dans les trente jours de l'événement ». Ce dernier terme a été illustré par une circulaire du 22 février 2010 qui évoque une « liste non limitative » de travaux sans conséquence pour le montant du revenu cadastral.

Le Cri a évoqué à diverses reprises des exemples positifs ou négatifs d'informations de l'Administration.

3. Depuis 1979 certains souhaiteraient une taxation des « loyers réels ». Les débats pour ou contre cette hypothèse ont surgi au cours des travaux parlementaires précédant la loi du 19 juillet 1979. Les discussions de principe reprennent périodiquement et la non concrétisation d'une modification de régime de taxation est due à la crainte d'une explosion de litiges.

La situation budgétaire actuelle pourrait écarter ce danger d'une réflexion approfondie et prendre le risque d'une explosion de litiges, avec sa répercussion immédiate sur le pouvoir judiciaire.

4. L'Administration est à l'affût des renseignements, directs ou indirects de matières imposables.

Par conséquent les suggestions de faire naître une divergence d'intérêts entre propriétaires et locataires à déclarer le loyer réellement payé est une aubaine pour le fisc. La suggestion hasardeuse de permettre une déduction d'une partie des loyers dans le chef du locataire moyennant la déclaration des montants qu'il a payés à ce titre est hasardeuse et est restée, à ce jour, heureusement sans écho. Elle impliquerait une révision fondamentale de l'article 53, 1° du Code des impôts sur les revenus qui proscrit la déduction des « dépenses ayant un caractère personnel ».

Certes, l'Administration dispose déjà de la possibilité de consulter à l'enregistrement les baux d'habitation principale puisque ces derniers baux sont enregistrés à titre gratuit, la démarche à l'enregistrement reposant exclusivement sur le bailleur. Le bailleur qui omet d'enregistrer semblable bail, ne sera pas sanctionné « fiscalement », mais subira la résiliation du bail par son locataire, sans préavis ni indemnité.

5. Dans l'hypothèse d'une colocation, pour autant que les locataires soient tous des personnes physiques, le propriétaire personne physique reste taxable sur le revenu cadastral indexé, majoré de 40 %. Ce propriétaire doit déclarer, comme pour un bail « uni-locataire » le montant du revenu cadastral, non indexé.

6. Dans l'hypothèse de location de chambre d'étudiant, le même régime de taxation aux impôts sur le revenu est d'application, à savoir la taxation sur base du revenu cadastral afférent à la chambre donnée en location, indexé puis majoré de 40 %. Forcément cela implique de pouvoir opposer à l'Administration la ventilation du revenu cadastral pour déterminer la quote-part de celui-ci afférent au bien immobilier loué.

Toutefois, outre cette partie immobilière, il faut rester attentif à la partie mobilière dans l'hypothèse où ce logement est donné en location meublé. Cette partie mobilière est taxable distinctement comme un revenu mobilier. Le taux d'imposition pour cette partie correspond au taux du précompte mobilier, soit depuis le 1er janvier 2017, au taux de 30 %. Cependant, cette imposition à ce taux distinct s'applique après application d'un abattement forfaitaire de 50 % pour la base imposable.

Le bailleur sera prudent de fixer de commun accord avec son locataire étudiant (voir prudemment avec les parents de l'étudiant) dans le contrat enregistré la partie « mobilière » pour limiter cette partie taxable au taux distinct de 30 %.

A noter que pour les biens meubles qui équipent le « kot », les 2/5 du loyer sont légalement sensés représenter le montant brut des revenus imposables de biens mobiliers, à défaut de précision dans le contrat, en vertu de l'article 4, 2°b in fine de l'arrêté royal d'exécution du Code des impôts sur le revenu.

Les locations via la plateforme internet Airbnb intéressent de plus en plus tant le SPF Finances que les Administrations communales. Il faut certes faire une distinction entre, d'une part, des mises en location épisodiques et très limitées dans le temps qui ne devraient pas engendrer de fâcheuses déconvenues fiscales, de l'autre hypothèse opposée à savoir une succession de mises en location au cours d'une même année par un « non professionnel ».

Dans cette deuxième hypothèse, si les offres de location sont réalisées dans un cadre relevant de la notion juridique d'économie collaborative visée à l'article 90, §1er, 1bis du Code des impôts sur le revenu, le bailleur est taxable sur ce revenu « divers » au sens du Code des impôts sur le revenu.

Il s'agit d'un régime complexe qui a été introduit dans notre législation par la loi-programme du 1er juillet 2016.

7. Lorsque l'immeuble pris en location est affecté à un usage professionnel par le locataire personne physique et pris en location par une personne morale (à titre exemplatif tant une société ayant un but lucratif qu'une personne morale sans but lucratif, à l'instar d'une asbl effective), le propriétaire est taxable sur le montant du « loyer net », sans que ce montant puisse être inférieur au revenu cadastral indexé, à majorer en outre de 40 %.

Ce montant taxable doit également être majoré des éventuels avantages locatifs obtenus au cours de la période imposable. Il est entendu que ce total ne peut être inférieur au revenu cadastral indexé majoré de 40 %. Certes, du total du loyer brut, le bailleur peut déduire un forfait maximal de charge qui lui-même ne peut excéder deux tiers du revenu cadastral revalorisé suivant le coefficient déterminé annuellement.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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