Un nouveau droit de préférence pour le locataire à Bruxelles à compter du 1er janvier 2024

Le CRI n°478 - Novembre 2023
Un nouveau droit de préférence pour le locataire à Bruxelles à compter du 1er janvier 2024

Le parlement bruxellois a voté une ordonnance qui va changer beaucoup de choses lors de la vente d’un logement loué.

Bien que ce ne soit pas encore publié au Moniteur belge, l’entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2024.

Cela veut dire que les ventes en cours doivent être signées de préférence en 2023, car à défaut, le notaire devra offrir la préemption au locataire.

La loi n’est pas claire quant à savoir si une offre acceptée ou un compromis signé en 2023 mais dont l’acte notarié se signe en 2024, écarte la procédure du droit de préférence, mais à notre avis, une vente conclue en 2023 écarte ce droit de préférence du locataire dès lors que la vente a été conclue avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation.

On peut même prétendre qu’une mise en vente qui a démarré en 2023 ne sera pas soumise au nouveau droit de préférence, mais il faudra attendre une confirmation pour en être certain.

Qu’est-ce le « droit de préférence » en faveur du locataire ?

Le droit de préférence est un droit donné au locataire pour lui permettre d’acheter le logement loué avant toute autre personne, aux conditions proposées par le bailleur qui a décidé de vendre ce logement.

Le locataire dispose d’un délai de 30 jours pour accepter l’offre du bailleur à compter de la « réception » de la notification.

Si le locataire n’accepte pas cette offre ou s’il laisse passer le délai de 30 jours, le bailleur peut vendre le bien aux mêmes conditions à toute personne intéressée.

Qu’est-ce que le « droit de préemption » en faveur du locataire ?

Bien souvent, le bailleur trouvera un amateur à des conditions plus avantageuses que celles offertes initialement au locataire, comme par exemple, un prix de vente moins élevé, une condition suspensive à l’obtention d’un crédit, une régularisation urbanistique, des travaux effectués par le vendeur, etc.

Dans ce cas, le droit de « préférence » devient un droit de « préemption » car il faut à nouveau informer le locataire.

On parle d’un droit de « préemption » quand il y a deux personnes qui se disputent le même bien : d’une part, l’amateur, et d’autre part, le locataire.

Le notaire devra dans ce cas recommencer une procédure plus courte de 7 jours, pour soumettre ces nouvelles conditions au locataire tout en étant très prudent car il se trouve face à deux personnes différentes qui sont intéressées d’acquérir.

Nous ne détaillons pas la procédure à suivre et attendons d’avoir plus de renseignements sur les situations particulières qui peuvent se produire pour donner une information complète et détaillée ultérieurement.

Qui bénéficie du droit de préférence ?

Les locataires ne bénéficient pas tous de ce droit de préférence.

Il s’agit du locataire « signataire du contrat de bail » selon les travaux parlementaires.

En outre, ce locataire doit être domicilié dans le logement.

Sont exclus du droit de préférence :

  • Les locataires qui ne sont pas domiciliés dans le logement lorsque le bailleur les informe de la mise en vente du bien, d’où l’importance de prévenir le locataire de la mise en vente du bien conformément à l’article 242 du Code du logement (1) qui est déjà en vigueur depuis 2018 car cet article n’exige pas la domiciliation ; la loi n’a toutefois pas prévu le cas où aucun des locataires n’est domicilié dans le bien, mais que l’un d’eux s’y domicilie avant la vente… (2)

  • Les baux de courte durée (maximum 3 ans) mais bien les baux qui étaient initialement convenus pour une courte durée qui sont devenus des baux de 9 ans par le dépassement du délai ;

  • La vente à un partenaire ou à un membre de la famille du vendeur jusqu’au troisième degré ;

  • La vente d’un usufruit ou d’une nue-propriété ;

  • La vente en rente viagère ;

  • Les actes de société comme les fusions, scissions et liquidations ;

  • La vente à une société détenue par la famille du vendeur jusqu’au troisième degré ;

  • La cession de droits indivis entre co-propriétaires ;

  • La vente à une administration publique ;

  • L’expropriation ;

  • Les logements frappés d’un arrêté d’inhabitabilité ;

  • Les immeubles à appartements occupés par différents locataires ;

  • Les biens ayant fait l’objet d’une promesse de vente avec date certaine antérieure à la conclusion du bail pour autant que cette promesse soit acceptée par son bénéficiaire.

Ventes publiques

La nouvelle réglementation a prévu une procédure spécifique pour les ventes publiques par notaire.

Nous ne détaillerons pas ici cette procédure, tout en retenant que le locataire peut exercer son droit de préférence qui devient dans son cas un réel droit de préemption, soit en séance quand les enchères ont lieu dans un café ou dans une salle de vente, soit avec une procédure spécifique en cas de vente dématérialisée (« BIDDIT »).

Dans le cadre d’une vente publique dématérialisée, le locataire peut communiquer son enchère maximale de manière séparée et discrète au notaire, sans devoir surenchérir avec les autres amateurs.

C’est lorsque la dernière enchère est atteinte sur BIDDIT que le notaire vérifie l’offre du locataire ; si cette offre est égale ou supérieure, le locataire se voit adjuger le bien. Si par contre, l’offre est inférieure à la dernière enchère, le notaire adjugera au dernier enchérisseur sans devoir reposer la question au locataire.

Il s’agit dans ce dernier cas, d’un véritable droit de préemption en faveur du locataire puisqu’il peut prendre la place d’un amateur à prix égal.

Sanction

En cas de méconnaissance du droit de préférence ou du droit de préemption du locataire, ce dernier peut demander la nullité de la vente faite à un tiers afin de prendre sa place tout en payant le même prix.

Cette sanction est la plus grave qu’on puisse imaginer car elle insécurise l’acheteur de bonne foi qui a passé l’acte chez le notaire et pensait pouvoir dormir sur ces deux oreilles.


(1) art 242 CLB : « En cas de mise en vente du logement de gré à gré, le bailleur, préalablement à toute communication publique relative à la mise en vente, notifie au preneur, par lettre recommandée à la poste ou par exploit d'huissier, son intention de vendre le logement. »

(2) Le notaire chargé de la vente se trouvera devant un choix difficile car au moment de la mise en vente, le locataire n’avait pas droit à la procédure de préférence faute d’y être domicilié, mais comme le bailleur ne lui a pas notifié les conditions de vente, il pourra toujours se domicilier par la suite : cela fera l’objet d’un positionnement plus détaillé ultérieurement.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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