1. Le communiqué du Syndicat National des Propriétaires et Copropriétaires du 17 septembre dernier lançait un appel aux négociateurs de l'époque afin de réduire « la ponction fiscale sur le patrimoine ». Les communes n'hésitent pas non plus à s'efforcer à faire flèche de tout bois pour prélever des écus sur l'immobilier.
Les Cours et Tribunaux contraignent à réfléchir. Ce devoir de réflexion découle ici de différents arrêts de la Cour d'appel de Bruxelles. Nous en retiendrons trois à titre exemplatif.
2. En Région flamande, la commune de Meise a entendu compenser la non perception de centimes additionnels à l'impôt des personnes physiques, en raison de l'absence d'inscription d'une personne physique dans les registres de la population, par une taxe communale sur les habitations et constructions qualifiées juridiquement de vides. Le premier règlement communal remonte au 29 mars 2012. Le terme juridique dont use le règlement communal est « leegstand ».
En l'espèce, un avocat y avait fixé son cabinet impliquant forcément sa présence, et celle de personnes salariées ou non, outre des passages de clients.
L'erreur commise par ce propriétaire juriste est d'avoir négligé l'affectation urbanistique déclarée antérieurement en 1972, à savoir celle d'une affectation de cet immeuble à usage unique d'habitation.
La Cour d'appel de Bruxelles a confirmé par son arrêt du 8 septembre 2020 (2016/AF/249) le jugement de première instance en observant qu'eu égard aux termes tant du règlement communal qu'aux termes du décret flamand en matière d'urbanisme (article 2.2.6, §2 du 17 mars 2009), le permis de bâtir délivré antérieurement (en 1972) impliquait une affectation exclusive à usage d'habitation.
Un changement d'affectation en fait doit être précédé de la réussite d'un changement d'affectation auprès des services communaux en matière d'urbanisme.
3. L'appétit fiscal de certains pouvoirs locaux est heureusement parfois contrarié.
Les taxes communales sur les logements meublés ou non meublés ont fleuri. La Cour d'appel de Bruxelles, confirmant un jugement de première instance, a souligné dans un arrêt du 2 juin 2020 (2015/AF/330) qu'en vertu de l'article 464, 1° du Code des impôts sur les revenus, une commune, nonobstant son autonomie fiscale, ne dispose pas du pouvoir de majorer l'impôt des personnes physiques ou l'impôt des sociétés, de centimes additionnels en raison de la location de chambres meublées ou non. La Cour d'appel souligne que cette interdiction de prélever un impôt similaire aux impôts des personnes physiques et des sociétés a pour buts de respecter la différence entre les taxes communales et les impôts sur les revenus, ainsi que le principe « non bis in idem », à savoir l'interdiction de prélever plusieurs impôts similaires sur une même base imposable.
4. La commune d'Ixelles a cru erronément que sa situation financière serait de nature à justifier un règlement-taxe sur les surfaces de bureaux, mais contenant une différence de traitement (certes accueillie en première instance) à savoir une exonération de la taxe pour les seules surfaces de bureaux servant à l'exercice d'une profession médicale ou paramédicale reconnue, et ce « au vu de l'utilité publique des activités menées ». La commune avait fait également valoir que ces surfaces de bureaux sont « affectées à des activités non marchandes et à des services publics ».
Une société d'avocats a obtenu la réformation de ce jugement par la Cour d'appel de Bruxelles. L'arrêt prononcé le 14 mai 2020 (2016/AF/236) observe notamment que « ... l'avocat ou le notaire, comme le médecin, exerce des professions libérales qui comportent en soi des obligations qui relèvent de l'intérêt général du service public justifiant que l'Etat subventionne le bureau d'assistance juridique par exemple ou encore l'octroi de l'assistance judiciaire gratuite de certaines procédures, par le biais d'une solidarité sociale financée par les impôts... »
Les obligations mises à charge des avocats en vertu du droit d'accès à la justice et à un procès équitable consacrent aussi, selon l'arrêt, le caractère non exclusivement marchand de cette profession. A l'inverse, l'affirmation du caractère prétendument prépondérant d'utilité publique des professions médicales et paramédicales n'est pas établie du seul fait de l'existence du système de sécurité sociale, sans oublier que certains praticiens sont « déconventionnés ».
La Cour d'appel a conclu à l'absence de justification raisonnable et objective à la différenciation qualifiée par la Cour d'arbitraire.
5. L'augmentation du nombre de litiges en matière de taxes communales est surprenante et semble imputable à l'accroissement d'hypothèses de taxations elles-mêmes consécutives à l'accroissement des charges financières locales.