Comment rentabiliser à la location une "grande" maison en Région wallonne ?

Le CRI n°485 - Juin 2024
Comment rentabiliser à la location une "grande" maison en Région wallonne ?

Les vastes demeures n’ont plus la cote tant à la vente qu’à la location.

Si le prix de vente est approché sur base de la superficie, il est fréquent alors de constater, à partir d’une certaine superficie, que plus l’immeuble est grand, plus la valeur au mètre carré a tendance à diminuer.

Attention : relevons que l'analyse qui suit porte exclusivement sur les dispositions en Région Wallonne.
Certaines de ces dispositions sont distinctes, et, à notre avis, d'ailleurs plus complètes et équilibrées en ce qui concerne la possibilité d'adresser le renom et de « sortir » du bail.

Quant à la location, à moins de trouver un preneur affectant le bien à usage commercial ou de bureaux (avec les conséquences fiscales susceptibles d’en découler) ou à une finalité telle qu’une Ambassade ou un Consulat…, il n’est pas évident de trouver une famille intéressée par de grandes superficies à chauffer et à entretenir « en bon locataire ».

Inutile aussi de rappeler que la composition des familles tend à se restreindre et qu’existent aussi de plus en plus de familles monoparentales.

Mais n’y-a-t-il pas des pistes pour néanmoins attirer des locataires ?

Partons d’une analyse qui fut notamment menée dans certaines villes françaises.
Si celle-ci avait été menée en Belgique, le résultat aurait été fort semblable.

L’espace reste un attrait pour autant qu’il puisse, grâce à « un partage », ne pas générer des dépenses excessives. De nombreux jeunes sont attirés par une colocation. Et dans ces colocataires, on peut retrouver aussi des moins jeunes, en couple ou non, souvent sans enfant, de la génération de 30 à 40 ans. Ils sont désireux ou (soyons prudents) non effrayés de vivre une vie avec d’autres, au vu des avantages en résultant.

Nous examinerons quelles sont les dispositions légales applicables.
La matière est régie en Région wallonne par le Décret du 15 mars 2018.

Nous retirerons de ce Décret les articles les plus importants:

« Les colocataires sont solidairement tenus de l’ensemble des obligations qui découlent du bail » (article 66).

Ainsi, si le contrat conclu engage chacun des colocataires l’ayant signé, l’absence de respect des obligations par un de ceux-ci rend tous les autres tenus des obligations du défaillant. C’est la disposition la plus intéressante et protectrice des droits des bailleurs

« Lorsque l’ensemble des colocataires met fin au bail, le congé doit être signé par chacun d’entre eux » (article 67).

Certes, le bail prend fin de plein droit à son échéance mais une résiliation anticipée par l’ensemble des colocataires reste possible pour autant qu’ils se mettent d’accord et que le bailleur y consente puisqu’il s’agit d’une résiliation.

« Le colocataire qui souhaite se libérer de ses obligations avant le terme du bail, notifie simultanément au bailleur et à ses colocataires un congé de trois mois.

Après la période de trois mois visée à l’alinéa 1er, le colocataire qui a notifié son congé est libéré de ses obligations sans indemnité à condition que le bailleur et ses colocataires aient donné leur agrément sur son remplaçant, cet agrément ne pouvant être refusé que pour de justes motifs.

A défaut d’agrément, le colocataire visé à l’alinéa 1er est libéré de ses obligations à l’issue de cette période de trois mois moyennant le paiement d’une indemnité équivalente à trois fois la part du colocataire dans le loyer, à ses colocataires… » (article 687).

Il nous semble que le texte aurait pu être plus clair…

Essayons toutefois d’en retenir l’essentiel.

La solidarité demeure tant que le colocataire sortant n’est pas libéré de ses obligations. Et ses obligations sont les suivantes :

  • Obtenir du bailleur et des colocataires leur agrément sur son remplaçant.

Nous voyons déjà poindre de réelles difficultés car il est relevé que l’agrément ne peut être refusé que pour de justes motifs.

Qui va juger si le motif est « juste ou non » ?

Ainsi, si le remplaçant proposé est un fumeur et si des colocataires relèvent qu’une odeur de tabac dans l’immeuble ne permet pas une vie saine, est-ce là un juste motif ?

Si le remplaçant n’apparaît pas avoir une solvabilité suffisante, le bailleur ou les colocataires (au vu de la solidarité existante) brandissent-ils là un « juste motif » ?

Nous attendons avec curiosité la jurisprudence qui pourra se développer sur cette question.

Le législateur n’a toutefois pas voulu enfermer le colocataire n’ayant pas obtenu l’agrément dans une obligation permanente puisqu’ à défaut d’agrément, comme précisé dans le texte, il sera libéré de ses obligations après une période de trois mois moyennant le paiement d’une indemnité équivalent à trois fois la part du colocataire dans le loyer, indemnité versée à ses colocataires.

« Le remplaçant du colocataire qui s’est libéré de ses obligations avant le terme du bail succède à ses droits et obligations pour la durée du bail restant.

A l’arrivée de tout nouveau colocataire, les parties concluent un avenant au bail.

L’obligation d’enregistrement de l’avenant visé à l’alinéa 2 repose sur le nouveau colocataire » (article 69).

Il est évident que les obligations au niveau de la durée telles que précisées dans le pacte de colocation initial ne sont pas modifiées par le remplacement intervenu, seul un avenant devant être rédigé.

« A chaque départ et à chaque arrivée d’un nouveau colocataire, les colocataires dressent un avenant à l’état des lieux qui visera les parties privatives du colocataire entrant ou sortant et les parties communes.

En cas de départ anticipé d’un colocataire, l’avenant à l’état des lieux est établi à ses frais ou à frais partagés avec son remplaçant s’il est remplacé dans la colocation » (article 70).

Même si cette disposition ne nécessite pas de développement particulier tant elle est évidente, reconnaissons que la succession possible de colocataires va générer dans le chef du bailleur des prestations puisque le bailleur entendra être présent, quand bien même le texte précise que ce sont les colocataires qui dressent l’avenant à l’état des lieux.

Certes, de cette façon, le bailleur pourra revenir sur place et voir dans quel état se trouve son bien. Il pourra ainsi contrôler le bon état général de l’immeuble aussi dans les parties communes.

« Lorsque la moitié au moins des colocataires signataires du bail initial ont chacun donné leur congé, le bailleur peut mettre fin au bail en donnant un congé de six mois dans les formes et ce, dans le mois suivant la notification du dernier congé d’un colocataire » (article 71).

Cette disposition est légitime dans la mesure où la modification des personnes avec lesquelles le bailleur a initialement conclu, peut-être d’une importance telle que le bailleur n’entend pas poursuivre l’exécution du contrat.

« Les colocataires signent un pacte de colocation.

Le pacte de colocation est établi en autant d’exemplaires qu’il y a de colocataires.

A l’arrivée de tout nouveau colocataire, un avenant au pacte de colocation est conclu.

Le pacte fixe à tout le moins :

  1. La répartition du loyer entre colocataires lorsque celle-ci n’est pas prévue par le contrat de bail.

  2. La répartition des charges communes, privatives, forfaitaires ou provisionnelles entre colocataires.

  3. L’inventaire des biens meubles précisant leur propriétaire.

  4. Les modalités de conclusions des contrats d’approvisionnements relatifs aux charges.

  5. Les modalités de conclusions des contrats d’assurance relatifs aux biens loués.

  6. Les modalités d’arrivée, de départ et de remplacement d’un colocataire.

  7. Les conditions de constitution et de libération de la garantie locative.

  8. Les modalités de résolution des conflits entre les colocataires» (article 72).

Beaucoup, beaucoup… d’éléments à mettre dans ce contrat.

Aussi, à ceux qui entendent rentrer dans la logique de la colocation pour leur « grande » maison, nous ne pouvons que vous conseiller de partir du modèle de contrat rédigé par notre Syndicat qui, par la structure telle que présentée, vous permettra de ne pas oublier les points repris dans cet article 72.

« Le précompte immobilier afférent à l’habitation louée ne peut être mise à charge du preneur » (article 73.

Il s’agit là d’un point propre à tous les baux de résidence principale.

« Les dispositions contenues aux articles 65 à 73 du présent Décret sont impératives » (article 74).

Le caractère impératif de ces articles signifie que, si dans le pacte de colocation, le propriétaire a voulu insérer une disposition qui est « contraire » à ces articles, le colocataire pourra brandir cette contrariété devant le Tribunal pour relever que l’article qu’on veut lui imposer ne lui est pas opposable.

« Le Gouvernement arrête un modèle indicatif de pacte de colocation » (Article 75).

Nous ne pouvons, comme précisé supra, que vous conseiller d’avoir recours au bail mis sur pied par notre syndicat.

Conclusion

Si nous ne pouvons que nous réjouir de l’insertion des dispositions spécifiques liées à la colocation promue à un réel développement, force est de reconnaître que le cadre fixé peut paraître quelque peu rébarbatif.

Toutefois, la grande avancée qui peut justifier de rentrer dans ledit cadre, est celle d’attirer bon nombre de preneurs dans un bien qui, pour une seule famille, ne peut convenir.

De plus, la solidarité entre colocataires est pour le bailleur une réelle garantie, cette solidarité demeurant tant que le colocataire sortant n’est pas libéré de ses obligations conformément à l’article 68 du Décret Wallon.

Toutefois, il se pose bien naturellement la question déterminante de l’éventuel respect des dispositions urbanistiques.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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