La garantie locative peut être l'occasion de tensions dans les relations entre bailleurs et locataires. Initialement destinée à être une source de sécurité pour le bailleur qui se trouverait démuni à l'échéance du bail en cas de non-respect, par son locataire, de ses obligations contractuelles, la garantie locative est parfois source de conflit tout au long du bail.
On la rencontre, en effet, à plusieurs périodes dans la relation contractuelle, que ce soit au moment de la signature du bail (choix quant au mode de constitution), au moment de la délivrance des lieux loués, mais aussi au moment de l'état des lieux de sortie (montant forfaitaire à retenir, le cas échéant, sur la garantie locative), etc. Cet article a pour but de rappeler les grands principes qui règlent cette matière.
Faut-il légalement qu'une garantie locative soit constituée ?
La constitution d'une garantie locative dépend de la volonté des parties. Souvent, le bailleur demandera, dans une clause du bail, qu'une garantie locative soit constituée, sans laisser la possibilité au preneur de négocier ce point. Le seul point susceptible d'être discuté par le locataire porte sur son mode de constitution. Le (candidat-)preneur ne peut s'opposer à la présence d'une telle clause dans le bail. S'il n'est pas satisfait quant à l'existence de cette obligation, il peut tenter de convaincre le bailleur de ne pas en constituer une mais il ne pourra pas imposer à ce dernier sa solution. Le SNPC-NEMS déconseille fortement aux propriétaires-bailleurs d'accepter une telle proposition car la garantie locative peut être comparée à une « bouée de sauvetage » pour le bailleur en cas de conflits avec son preneur que ceux-ci portent sur des arriérés de loyers, des dégâts locatifs ou, de manière plus générale, en cas de non-respect des obligations issues du bail . Dans les baux rédigés par le SNPC-NEMS, la clause prévoyant la constitution d'une garantie locative est bien évidemment présente. Bailleurs et propriétaires disposent du choix quant au mode de constitution de celle-ci.
La garantie locative peut être l'occasion de tensions dans les relations entre bailleurs et locataires. Initialement destinée à être une source de sécurité pour le bailleur qui se trouverait démuni à l'échéance du bail en cas de non-respect, par son locataire, de ses obligations contractuelles, la garantie locative est parfois source de conflit tout au long du bail.
Quand faut-il constituer la garantie locative ?
C'est généralement au moment de la conclusion du bail que le bailleur exige la constitution de la garantie locative. Celle-ci peut, au plus tard, être constituée au moment de l'entrée dans les lieux loués. Toutefois, la pratique nous force à constater que dans ce cas, il faut être très prudent et veiller à ce que son locataire constitue la garantie locative le plus rapidement possible.
Le SNPC-NEMS conseille au bailleur d'indiquer dans le bail que les clés ne seront remises au locataire qu'après constitution de la garantie locative. Souvent, les locataires entrent dans les lieux loués sans constituer celle-ci. Le bailleur se trouve alors démuni et n'est pas bien armé pour contraindre son locataire à constituer la garantie locative, une fois ce dernier entré dans les lieux. La constitution d'une garantie locative, dès qu'elle est convenue dans le bail, constitue une véritable obligation contractuelle dans le chef du locataire. A défaut pour ce dernier de s'exécuter, le bailleur ne procèdera pas à la remise des clés.
Ce type de clause suspend l'exécution de l'obligation du bailleur (en l'espèce, l'obligation de délivrance) à l'exécution par l'autre partie, le locataire, des obligations contractuelles (en l'espèce, la constitution de la garantie locative). Cette clause constitue une application de l'exception d'inexécution, applicable dans les contrats synallagmatiques (contrats dans lesquels des prestations/obligations sont prévues dans le chef de chacune des parties).
Même si le locataire procède au paiement du premier loyer, il n'est pas abusif de la part du bailleur de suspendre l'exécution de son obligation de délivrer les lieux loués jusqu'au moment où la garantie locative aura été constituée par le preneur.
La clause suspendant la remise des clés, par le bailleur au locataire, à la constitution de la garantie locative par ce dernier ne doit pas être confondue avec la clause selon laquelle « en cas de non-constitution de la garantie locative, le bail est nul et non avenu ». Cette dernière constitue un pacte résolutoire exprès et, est expressément interdite en matière de baux de résidence principale. De plus, un bail déclaré nul ne peut être résolu puisqu'il n'a, en réalité, pas reçu un commencement d'exécution.
Si une garantie locative est prévue en vertu du contrat, il s'agit d'une obligation contractuelle dont le non-respect constitue un manquement contractuel et pour lequel il est possible de demander la résolution du bail aux torts du preneur. Toutefois, certains juges de paix sont réticents à prononcer la résolution du bail aux torts du preneur pour non-constitution de la garantie locative s'il s'agit du seul manquement qui peut lui être reproché et que le locataire est déjà dans les lieux loués. La pratique nous dévoile que souvent, le juge de paix accorde un délai pour que le locataire s'exécute. A défaut d'avoir constitué celle-ci dans le délai imposé, le juge de paix prononce soit la nullité du bail, soit la résolution de celui-ci si le locataire est entré dans les lieux. L'entrée dans les lieux du locataire et la non-constitution de la garantie locative n'empêche pas “ipso facto” le prononcé de la nullité.
Que faire si mon locataire occupe les lieux loués mais qu'il n'a pas constitué la garantie locative ?
C'est, dans cette situation précisément, que le bailleur se trouve fort démuni. Comme dit supra, les juges de paix sont réticents à prononcer la résolution du bail aux torts du preneur si le manquement invoqué consiste uniquement en la non-constitution de la garantie locative et que le reste des obligations issues du contrat sont remplies.
Depuis la régionalisation du bail, les régions ont chacune adopté des règles portant sur le mode de constitution de la garantie locative.
Zoom sur les possibilités offertes au locataire pour la constitution de la garantie locative (bail de résidence principale)
Petit zoom sur les dispositions applicables dans chaque Région.
La Région Wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale
Les deux régions prévoient que la garantie locative, lorsqu'elle est reprise dans le bail, ne peut excéder un montant équivalent à deux ou trois mois de loyer, selon la forme de la garantie locative choisie par le preneur. Elle peut être constituée de trois manières :
soit sur un compte individualisé ouvert au nom du preneur auprès d'une institution financière (dans ce cas, la garantie locative est équivalente à 2 mois de loyer) ;
soit une garantie bancaire qui permet au preneur de constituer progressivement la garantie (dans ce cas, la garantie locative est équivalente à 3 mois de loyer maximum) ;
soit une garantie bancaire résultant d'un contrat-type entre un CPAS et une institution financière (dans ce cas, la garantie locative est équivalente à trois mois de loyer maximum).
La Flandre
La Région Flamande prévoit que pour assurer le respect de ses obligations, le preneur ne peut donner qu'une des formes de garantie prévue dans le décret. La Région flamande a opté pour un montant identique sans avoir égard au mode de constitution de la garantie locative. Désormais, pour les baux conclus en Flandre à partir du 1er janvier 2019, la garantie locative est équivalente à 3 mois de loyer maximum. La garantie locative peut être constituée :
soit sur un compte individualisé ouvert au nom du preneur ;
soit en offrant une sûreté réelle (la sûreté réelle est le mécanisme par lequel, le preneur met un bien déterminé de son patrimoine à la satisfaction des intérêts du bailleur. La sûreté protègera le bailleur contre l'insolvabilité du locataire) ;
soit en vertu d'un contrat-type entre le CPAS et l'institution financière.
Constitution de la garantie sur un compte bloqué au nom du preneur
Le bailleur doit être prudent car s'il garde entre ses mains les sommes d'argent versées par son locataire à titre de garantie locative, il se place dans l'illégalité et la sanction de celle-ci n'est pas légère. En effet, si la garantie locative n'a pas été placée sur un compte bancaire, le locataire peut, après mise en demeure préalable en cours de bail, demander en fin de bail le remboursement de la garantie locative majorée des intérêts aux taux légal. La loi du 20 février 1991 avait introduit cette sanction pour lutter contre les abus de certains bailleurs qui conservaient les fonds sur leur compte personnel sans faire bénéficier les locataires des intérêts qui à l'époque pouvaient être élevés. Le SNPC-NEMS conseille vivement à ses membres, propriétaires-bailleurs, d'être vigilants sur ce point. Les Régions ont maintenu cette sanction.
La garantie bancaire constituée progressivement par le preneur
Ce type de garantie locative a fait couler beaucoup d'encre, notamment celui de la plume de la Cour constitutionnelle en 2008 à l'occasion d'un recours en annulation introduit par certaines banques contre ce type de garantie locative. Les banques n'ont pas réussi à mettre en échec ce mode de constitution de la garantie locative. Les banques ne l'apprécient pas car elle impose, en fait, aux banques de consentir un prêt sans intérêt. Pour constituer cette garantie, les banques doivent mettre à disposition des locataires, des fonds/une somme d'argent (équivalente à 3 mois de loyer maximum), sans recevoir un euro du preneur et sans pouvoir porter en compte des intérêts. La réticence des banques face à cette garantie locative bancaire peut également se justifier par le fait qu'elles ne peuvent refuser de consentir celle-ci en raison du peu de solvabilité du locataire.
Nous terminerons ce point en affirmant que ce type de garantie locative est très rare dans la pratique. La Région flamande a peut-être également fait ce constat en supprimant ce type de garantie locative. En effet, la Flandre a supprimé la garantie bancaire et a remplacé celle-ci par le mécanisme des sûretés réelles.
La garantie locative constituée en vertu d'un contrat-type entre le CPAS et une institution financière, garantie locative avec cautionnement du CPAS
Cette garantie constitue une variante de la garantie bancaire. La banque intervient à la demande du CPAS, lui-même préalablement sollicité par le locataire. Dans ce cas, la banque procure une garantie équivalente à 3 mois de loyer au bailleur. Le CPAS se porte caution du preneur, par le biais d'un contrat-type entre banque et CPAS. Ce dernier s'engage vis-à-vis de la banque en cas de non reconstitution de la garantie bancaire par le preneur.
Le SNPC-NEMS conseille aux bailleurs d'être vigilants au degré d'intervention financière du CPAS. Il faut rester attentif à l'étendue des obligations souscrites. Certaines garanties-CPAS ne couvrent que les dégâts locatifs, sans avoir égard à la violation d'autres obligations contractuelles (arriérés de loyers, etc.).
Une autre voie offerte aux locataires pour constituer la garantie locative
Pour de nombreux locataires, rassembler les montants nécessaires à la garantie locative constitue une étape difficile. Cette dernière requiert, en effet, une importante mobilisation de moyens, comme le soulignent les développements de l'avant-projet de décret wallon instituant une aide à la constitution de la garantie locative, déposée par le CDH et adopté en première lecture par le gouvernement wallon le 2 juin dernier.
Conscient de cette difficulté, le CDH, initialement contre, a déposé l'avant-projet de décret wallon, notamment pour se mettre en conformité avec les deux autres régions du pays qui avaient déjà agi dans ce sens mais notamment parce qu'à l'inverse de la proposition introduite, il y a quelques années, le mécanisme n'est pas obligatoire.
La Région de Bruxelles-Capitale offre deux solutions
I. Le prêt du Fonds du logement
Le Fonds du Logement bruxellois peut, moyennant le respect de certaines conditions, accorder des prêts à taux zéro pour constituer une garantie locative. Le Fonds du Logement peut prêter 100% du montant. Le locataire peut demander un prêt à tempérament à 0% aussi bien pour la totalité du montant de la garantie locative que pour un montant inférieur. Le locataire, s'il le souhaite, peut donc emprunter moins de 100% de la garantie locative
A présent, nous allons analyser les conditions d'octroi pour qu'un locataire bénéficie de ce prêt à taux 0% :
a. Condition d'âge : le locataire doit être âgé de 18 ans au moment de l'introduction de sa demande.
b. Revenus maximums du ménage
Les revenus du ménage ne peuvent pas dépasser certains montants. La condition relative aux revenus du ménage peut varier en fonction de l'âge du locataire-demandeur (+ ou de 35 ans).
Pour plus d'informations, nous vous conseillons de contacter le Fonds du Logement de la Région de Bruxelles-Capitale ou de consulter leur brochure d'information sur l'aide régionale à la constitution d'une garantie locative.
c. Détention d'un droit réel sur un autre immeuble
Le locataire-demandeur ne peut être propriétaire d'un immeuble ou disposer d'un droit d'emphytéose ou d'usufruit sur un immeuble.
d. Obligations relatives au logement
Le bail doit :
être conclu pour une durée minimale d'un an ;
être situé sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale ;
être conforme à la loi ;
être consenti pour un logement qui répond aux exigences élémentaires de sécurité, de salubrité, d'habitabilité et d'équipement, définies dans le Code bruxellois du Logement (le Fonds du Logement prévoit qu'il refuse l'octroi d'une aide si le bail est consenti pour un logement qui ne répond pas à ces exigences).
e. Le cas particulier de la colocation
En cas de colocation, le Fonds du Logement bruxellois limite le capital prêté.
II. Le Fonds BRUGAL
La Région de Bruxelles-Capitale a prévu une autre possibilité pour les personnes qui ne seraient pas capables de rembourser un prêt, même si ce dernier est consenti à taux 0%. Dans ce cas, le fonds BRUGAL versera, anonymement, la somme nécessaire à la constitution de la garantie locative, sur un compte bloqué au nom du locataire.
Et en Région wallonne ?
L'avant-projet de décret, déposé par le CDH pour la Région Wallonne, s'est largement inspiré du système mis en place à Bruxelles. En Wallonie, c'est Fregal (Fonds de logement de Région Wallonne) qui est l'autorité compétente.
Il s'agit en réalité d'un crédit sans intérêt dont la durée ne peut être supérieure à la durée du bail.
Pour être éligible au fonds Fregal, le locataire-demandeur doit :
être âgé de 18 ans (et être capable de contracter) ou être émancipé ;
avoir conclu un bail d'une durée minimale d'un an pour un bien située en Wallonie ;
se domicilier dans les lieux loués.
Le but de cet avant-projet est d'aider les CPAS wallons, lesquels constituent la seule autorité publique aidant les bénéficiaires d'un revenu d'intégration sociale. Il est donc logique qu'une condition relative aux revenus soit également imposée. La condition de revenus est la suivante :
Une personne seule peut bénéficier d'un prêt à 0% pour constituer sa garantie locative si ses revenus annuels imposables ne dépassent pas 41.000 € majorés de 1860 € par enfant à charge ;
Plusieurs personnes unies ou non par des liens de parenté, qui vivent habituellement ensemble et dont les revenus annuels imposables ne dépassent pas 50.000 € majorés de 1860 € par enfant à charge peuvent en bénéficier également.
Le demandeur peut demander un prêt pour un montant inférieur à celui de la garantie locative mais Fregal prête généralement le montant correspondant à celui de la garantie locative.
En cas de colocation, le montant du capital prêté correspond à la partie de la garantie locative fixée dans le pacte de colocation.
En Région flamande
La Région flamande a également prévu la possibilité d'obtenir un prêt de garantie locative au Fonds flamand pour le logement (Vlaams Woningfonds).
Pour bénéficier de cette aide, il faut que :
Le demandeur soit inscrit dans les registres de la population ;
Le demandeur ne doit pas disposer de revenus dépassant les limites fixées par l'arrêté du Gouvernement flamand du 18 octobre 2013 réglant la location de logements locatifs modestes des sociétés de logement social ;
Le demandeur n'a pas d'habitation ou ne dispose pas d'un titre en pleine propriété ou d'un droit de bail emphytéotique, de superficie ou d'usufruit ;
Le demandeur ne doit pas être enregistré avec un retard de paiement à la Centrale des crédits aux particuliers
Le demandeur est locataire d'un bien loué situé en Région flamande ou présente un projet de bail pour un bien situé en Région flamande ;
Le bien loué n'est pas un logement locatif social sauf si l'habitation est sous-louée par une agence de location sociale ;
La demande doit être introduite dans les 3 mois de la signature du bail.
Il existe des dérogations à ces règles. Pour une analyse plus détaillée de cette règlementation, nous vous invitons à contacter nos services juridiques.
Prêt à taux 0%, où le rencontre-t-on également ?
La Région Wallonne
La Région wallonne prévoit, désormais, la possibilité pour certains locataires d'obtenir un prêt à un taux de 0% pour aider les locataires en difficulté. La Wallonie a mis cette possibilité en avant en prévoyant expressément sur leur site internet qu'il s'agit notamment d'une aide en faveur des locataires en difficulté en cette période de pandémie liée au COVID-19.
La Région Wallonne a décidé de créer un prêt à taux zéro en faveur des locataires qui rencontrent des difficultés à payer leur loyer. Le Gouvernement wallon a confié cette mission à la Société wallonne du crédit social.
Cette aide est accordée aux locataires wallons qui sont financièrement impactés par la crise actuelle. Ce prêt est prévu pour couvrir 6 mois de loyer maximum et doit être remboursé en 3 ans.
De l'intérêt du bailleur, vraiment ?
Conscient que ce qui précède ne touche pas le bailleur proprement dit, nous tenions néanmoins à informer ces derniers des possibilités qui sont offertes à leurs interlocuteurs. Connaitre celles-ci peut constituer un premier filtre pour le bailleur qui, après avoir informé le locataire, de son souhait qu'une garantie locative soit constituée, peut ainsi anticiper les fonds que détient son locataire.
Attention, le SNPC-NEMS n'est pas occupé à inciter ses membres à refuser de signer un bail avec des locataires qui font appel à ce type de prêt. Au contraire, être face à un locataire qui connait ses droits et qui fait le nécessaire pour assurer les intérêts de son bailleur est un gage de sécurité. Mieux vaut un candidat-locataire honnête, qui avoue avoir des démarches à accomplir pour constituer sa garantie locative que de courir derrière un locataire qui est entré dans les lieux loués et qui, in fine, ne constitue pas sa garantie locative.