Il est intéressant de faire le point sur l’évolution des prix de vente en Belgique.
Bien qu’on ne constate pas de baisse des valeurs immobilières comme on l’observe à Paris, les prix semblent avoir trouvé une certaine stabilité en Belgique.
Une nouveauté qu’il faudra cependant implémenter, c’est l’obligation qui nous est imposée par l’Union Européenne d’améliorer la performance énergétique des bâtiments (PEB).
Une première étude empirique est parue sur le site bien connu d’Immoweb. Elle démontre la différence des prix demandés en fonction de la classification des logements.
Incidence du prix demandé à la vente par rapport à un logement ayant un PEB « D »
On voit que la différence de prix demandée est substantielle en Flandre et en Wallonie, mais pas à Bruxelles. C’est probablement la conséquence d’une classification différente entre les régions, où Bruxelles détient la palme d’or de la sévérité. Ainsi il y aurait très peu de logements classés dans la meilleure catégorie « A » à Bruxelles.
Voici la classification officielle applicable entre les trois régions :
Consommation d’énergie kWh/m² par an
Ce qui frappe, c’est la grande disparité dans les classifications alors que la mesure est théoriquement identique. Ainsi un logement ayant une consommation de 285 kWh/m² par an sera classé « F » à Bruxelles, alors qu’il sera classé « C » en Flandre et « D » en Wallonie.
Cela crée la confusion.
A côté de cette question de PEB, il est intéressant de voir l’évolution des prix à différents endroits de Belgique.
Nous avons ainsi comparé des prix de vente moyens qui ont été répertoriés par un bureau d’expertise très réputé en Flandre, le bureau STADIM, dont le fondateur est Philippe Janssens.
Pour rappel, Philippe Janssens a été notre conférencier lors d’un traditionnel déjeuner au SOFITEL à Zaventem. Il est reconnu comme un des experts les plus expérimentés en Belgique.
Stadim : évolution du prix moyen d’une habitation de 100 à 299 m²
Ixelles
| année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 63.000 € |
| |
1998 | 130.000 € | + 106 % | |
2008 | 411.000 € | + 552 % | |
2022 | 854.000 € | + 1255 % |
Woluwe-Saint-Pierre
| année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 76.000 € |
| |
1998 | 145.000 € | + 90 % | |
2008 | 398.000 € | + 423 % | |
2022 | 651.000 € | + 757 % |
Knokke-Heist
| année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 51.000 € |
| |
1998 | 99.000 € | + 94 % | |
2008 | 333.000 € | + 553 % | |
2022 | 506.000 € | + 892 % |
Anvers (10 districts) | année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 39.000 € |
| |
1998 | 74.000 € | + 90 % | |
2008 | 194.000 € | + 397 % | |
2022 | 325.000 € | + 733 % |
Waterloo
| année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 63.000 € |
| |
1998 | 111.000 € | + 76 % | |
2008 | 247.000 € | + 292 % | |
2022 | 378.000 € | + 500 % |
Liège (10 sections)
| année | Prix moyen | Evolution |
1988 | 27.000 € |
| |
1998 | 54.000 € | + 100 % | |
2008 | 125.000 € | + 363 % | |
2022 | 180.000 € | + 567 % |
STADIM (Stadim Antwerpen – Stadim Brussels)
évolution 1988 à 2022 (récapitulatif) | Index prix cons. 1988-2022 | ABEX* 1988-2022 | PIB/habitant 1988-2022 | |
Ixelles | + 1255 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
Knokke-Heist | + 892 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
Woluwe-Saint-Pierre | + 757 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
Anvers | + 733 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
Liège | + 567 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
Waterloo | + 500 % | + 120 % | + 154 % | + 217 % |
* Abex = indice des prix à la construction
Que faut-il retenir de ces évolutions de prix fort contrastées ?
Primo, c’est toujours la localisation de l’immeuble qui est importante, mais les critères changent comme nous le démontre ce comparatif.
Un autre facteur qui influence les prix est l’évolution de la population :
Évolution du nombre d’habitants (source Statbel)
Évolution du nombre d’habitants (source Statbel) | |||
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| 1992 | 2024 |
|
Ixelles | 72.447 | 89.278 | + 23 % |
Anvers | 465.783 | 544.759 | + 17 % |
Woluwe-Saint-Pierre | 38.116 | 42.571 | + 12 % |
Waterloo | 27.917 | 30.956 | + 11 % |
Namur | 104.304 | 114.142 | + 9 % |
Mons | 92.428 | 96.358 | + 4 % |
Liège | 196.303 | 195.778 | = |
Charleroi | 206.903 | 204.322 | - 1 % |
Le tableau ci-dessus parle de lui-même.
Les grandes villes wallonnes connaissent une stagnation de leur population, à l’exception de Namur.
Cette stagnation de la population est la traduction d’une atmosphère économique morose, ce qui n’attire pas les nouveaux habitants contrairement à la zone autour de Bruxelles et la Flandre qui connaissent une activité économique plus soutenue.
Cette activité économique attire de nouveaux habitants et amène une meilleure performance des prix de l’immobilier.
Passons en revue certaines localités emblématiques
Ixelles
Comment expliquer qu’une commune comme Ixelles connaisse une évolution nettement plus marquée qu’une traditionnellement bien cotée comme Woluwe-Saint-Pierre ?
Il y a plusieurs raisons.
La mode a changé car le modèle familial a changé. Bruxelles comme la Belgique connaît une réduction de la taille des familles.
A Ixelles, le nombre de logements occupés par un ménage composé d’une seule personne est le double du nombre de logements occupés par plusieurs personnes.
C’est le phénomène qui est d’ailleurs observé partout en Europe, cela s’appelle « la décohabitation » ; on vit de plus en plus de manière isolée. Ce phénomène tend à se répandre, mais c’est à Ixelles que ce phénomène est particulièrement important.
Ixelles détient ainsi le record de Belgique du nombre de célibataires occupant à eux seuls leur logement.
On constate ainsi que les célibataires préfèrent acheter là où il y a des évènements, près de la Place Flagey ou dans la partie universitaire de la commune avec de nombreuses animations, mais aussi de nombreux bistros animés.
Une deuxième raison est la migration massive de Français qui fuient les impôts sur le patrimoine et la taxation des plus-values en France. On les appelle les SDF ou « sans difficulté financière » ; ils sont près de 12.000 Français rien qu’à Ixelles.
Knokke-Heist
L’évolution des prix à Knokke conforte le fait que la côte belge attire non seulement de plus en plus de familles flamandes, mais encore et toujours des Wallons et des Bruxellois, sans oublier les nombreux Allemands et Hollandais qui aiment se baigner dans l’atmosphère bon-enfant des Belges sur toute la côte.
La gestion politique de cette station balnéaire a également influencé l’évolution des prix ; tout le monde se rappelle les déclarations d’un précédent bourgmestre s’insurgeant contre les « frigo-box » sur la plage ce qui a conduit à une politique de stationnement très restrictive en vue de réduire la présence de touristes d’un jour.
Woluwe-Saint-Pierre
Cette commune est traditionnellement bien gérée sans augmentation des impôts comme ce fut le cas à Ixelles (+ 23 % en 2023), mais il ne s’y passe pas grand-chose, ce qui en fait une commune fort agréable à vivre pour des familles avec enfants alors que ce modèle familial s’essouffle dans notre monde occidental. Ainsi, l’évolution de la population de cette commune est fort contrastée en comparaison avec une commune comme Molenbeek-Saint-Jean qui a connu une croissance de population de 43 % depuis 1992.
Waterloo
Waterloo est une commune aisée qui développe une activité économique de plus en plus détachée de Bruxelles mais dont le bâti, de nombreuses grandes villas, ne correspond plus à la demande d’aujourd’hui.
Les familles qui cherchent un logement avec de nombreuses chambres se font plus rares, sauf à faire de la colocation, mais cette nouvelle formule de location est plus tendance dans les centres urbains.
Anvers
Contrairement à certaines villes flamandes comme Courtrai, Anvers connaît un nouveau souffle et s’affiche clairement comme seconde ville internationale de Belgique. La présence du port, deuxième port européen après Rotterdam y est pour beaucoup.
La gestion politique de cette ville a été bouleversée par le bourgmestre actuel qui a dû faire face à un endettement endémique ce qui ne l’a pas empêché d’être volontariste et d’avoir le courage d’imposer une politique urbaine ambitieuse. Cette politique a contribué à la hausse des prix de l’immobilier comme on peut le constater.
Liège
Liège a un riche passé, mais comme Charleroi, cette ville ne parvient pas à attirer des nouveaux habitants. C’est le signe d’une politique où le changement met du temps à se faire accepter. Liège souffre comme beaucoup de villes de l’exode des populations vers la périphérie, mais aussi d’un appauvrissement de son centre commercial. Ce phénomène est observé un peu partout en Belgique. Ces commerces des centres urbains doivent lutter contre la concurrence des grands centres commerciaux en bordure des villes, ils sont nombreux autour de Liège, et surtout contre la concurrence du commerce en ligne.