Agents immobiliers, adaptez vos contrats

Le CRI n°486 - Septembre 2024
Agents immobiliers, adaptez vos contrats

ATTENTION, dans vos contrats, de bien veiller au respect des 16 clauses obligatoires reprises dans l’Arrêté Royal entré en vigueur le 1er février 2024.

L’importance de ces clauses et leur nombre ne nous permettront pas de les aborder toutes en un seul article.

Aussi, nous les examinerons dans plusieurs articles distincts.

Dans la présente contribution, nous traiterons des 3 premières clauses.

Mais, préalablement, à titre préliminaire, il convient de relever 2 points déterminants : celui du caractère impératif du cadre légal et celui de son champ d’application

Sur le caractère impératif

Ainsi que, très justement rappelé dans l’article de Marc TORDOIR (Revue Copropriété et droit immobilier, avril-mai-juin 2024, 2024/2, p. 15), le caractère impératif signifie ce qui suit :

  • Toute disposition des conditions contractuelles qui abroge ou limite, de façon directe ou indirecte, les droits que les consommateurs tirent du présent Arrêté Royal, est interdite et nulle.

  • Le contrat restera contraignant pour les parties s’il peut subsister sans les clauses nulles.

  • Le consommateur ne peut renoncer au bénéfice des droits qui lui sont conférés par le présent Arrêté Royal.

Puisqu'en tout état de cause, les clauses qui seront analysées s'imposent en cas de contrariété avec les dispositions du contrat, est-ce à dire qu'une adaptation du contrat par les agents immobiliers est inutile, voire superfétatoire ?

Nous ne le pensons pas car la transparence à l’égard du consommateur et l’obligation d’information du professionnel, d’ailleurs relevée dans notre Code de Droit Economique, justifient pleinement que les adaptations des « anciens » contrats soient, s’il y a lieu, réalisées.

Comme le rappelle, de surcroît, l’auteur précité, cette obligation de transparence et d’information, en fonction du Code de Déontologie applicable aux agents immobiliers, est de mise.

Sur le champ d’application

Bornons-nous à retenir que les dispositions légales s’appliquent à toute entreprise qui fait de l’intermédiation immobilière à titre professionnel à l’exception des notaires.

Analysons, dans le présent article, les 3 premières clauses obligatoires.

1. La clause de rétractation

Etant la plus importante de toutes celles prévues, il est légitime qu’elle figure en première place, soit en caractère gras et dans un cadre distinct du texte.

Le modèle retenu serait :

« Dans les 14 jours calendrier à dater du lendemain du jour de la signature du présent contrat, le consommateur a le droit de se rétracter de la présente mission, à condition d’en prévenir l’agent immobilier.

Toute clause par laquelle le consommateur renoncerait à ce droit est nulle.

En ce qui concerne le respect du délai, il suffit que la notification soit expédiée avant l’expiration de celui-ci ».

Mais, quid si l’agent immobilier va « très vite », voire « trop vite » et réalise le bien pendant le délai de rétractation, lui qui aurait aussi reçu le mandat de signer le contrat ?

Certes, si l’agent immobilier, au moment de la signature du contrat, a reçu le feu vert du client pour son exécution immédiate, le vendeur est engagé et ne peut faire état de sa possibilité de rétractation.

Mais si tel n’est pas le cas et si la vente intervient pendant ledit délai alors que le vendeur a usé de son droit de rétractation à l’égard de l’agent immobilier, l’acheteur ne pourra-t-il pas se prévaloir de la théorie du mandat apparent ?

Nous voyons poindre à ce niveau quelques litiges possibles.

Rappelons les conditions d’application du mandat apparent :

  • Il faut une situation ostensible qui, par hypothèse, ne correspond pas à la situation réelle, mais que, ici, l’acquéreur considérera comme révélatrice de la situation de droit.

Cet acquéreur considérera donc légitimement avoir conclu le contrat d’achat.

  • Il faut aussi une erreur légitime dans le chef de cet acheteur victime de l’apparence.

  • Il faut qu’il ait pu croire que la situation dans laquelle il se trouvait correspondait à la situation réelle.

  • Mais, selon une jurisprudence plus récente, il faudrait aussi que le vendeur, même sans faute, ait contribué à créer l’apparence du droit en question.

Certes, nous ne pouvons que nous réjouir de l’insertion de cette clause de rétractation au profit du vendeur à l’égard de l’intermédiaire immobilier.

Mais si le vendeur peut « se réviser », l’acheteur qui, lui, a signé, parfois dans l’euphorie…, dispose-t-il d’un tel droit de rétractation pour revenir sur son engagement?

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La loi française, en cas de signature d’une offre d’achat, laisse à l’acquéreur une telle possibilité.

Ainsi, dans le droit français, dans les compromis, il est repris une faculté de rétractation souvent libellée comme suit :

« En vertu des dispositions de l’article L271/1 du Code de la Construction et de l’Habitation, le bien étant à usage d’habitation et l’acquéreur étant un non professionnel de l’immobilier, ce dernier bénéficie de la faculté de se rétracter.

A cet effet, le présent acte avec ses annexes lui sera notifié par lettre recommandée avec accusé de réception.

Dans un délai de 10 jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre de notification, l’acquéreur pourra exercer la faculté de rétractation, et ce par lettre recommandée avec accusé de réception… »

Dans notre droit, « le compromis de vente vaut vente ».

Ce principe, quoique toujours appliqué par les Tribunaux, à la lumière des éléments de fait qui sont liés à la vente, en atténue parfois sa rigueur, notamment en prenant en considération le fait que l’acquéreur n’aurait peut-être pas été suffisamment éclairé au moment de l’acquisition (absence de transparence sur les obligations urbanistiques, sur l’état du bâtiment, sur une condition suspensive mal libellée, etc.). Cette question est souvent traitée devant les tribunaux.

Ne serait-il toutefois pas opportun d’intégrer aussi dans notre droit une faculté de rétractation pour l’acheteur ?

Pourquoi permettre une rétractation du vendeur (certes, non à l’égard de l’acheteur mais à l’égard de l’intermédiaire immobilier, ce qui constitue, il est vrai, une différence) et non à l’acheteur ?

Or, de nombreux procès pourraient être évités si une telle faculté était également prévue.

N’y-a-t-il pas ici une discrimination, même si la rétractation prévue au profit du vendeur l’est exclusivement à l’égard de l’intermédiaire immobilier et non à l’égard de l’acheteur mais il n’en reste pas moins qu’il est donné de cette façon une possibilité pour le vendeur de revenir sur sa volonté initiale.

2. La mention de la date et l’adresse.

Ce point ne suscite guère de commentaire, tant il est évident.

Retenons néanmoins qu’il faut bannir les clauses type pré-imprimées.

3. La définition de la mission de l’entreprise et l’étendue de ses pouvoirs.

Serait-ce, à l’égard de l’agent immobilier, un contrat d’entreprise ou un contrat de mandat ?

Celui-ci devra-t-il exclusivement trouver l’amateur ou aura-t-il aussi pour mission de conclure lui-même le contrat en tant que mandataire ?

Et pour « trouver » l’amateur, quelle publicité pourra-t-il accomplir, par quelle voie ?

IMMOWEB étant le canal « classique », l’intermédiaire sera-t-il susceptible de proposer davantage ?

Il est utile que, dans le contrat, soient mentionnés les outils qu’il entend utiliser.

Il peut être aussi défini les jours et heures de visite si celui-ci assure ce travail.

Ce point est bien naturellement déterminant si des vendeurs occupent le bien ou si celui-ci est occupé par son locataire.

Nous nous penchons certes davantage, dans le présent article, sur l’agent immobilier chargé de trouver un amateur acheteur et aussi, si mandat lui est donné, de vendre le bien mais n’oublions pas que sa mission peut être distincte et porter aussi sur la mise en location.

Dans les deux cas (vente ou location), le client de l’agent doit veiller bien naturellement à transmettre son prix qui sera repris dans le contrat liant l’agent et le client.

Mais rien n’empêche aussi la fixation d’une fourchette en laissant la possibilité d’une négociation à l’intermédiaire.

Cette marge de manœuvre doit être clairement mentionnée mais il serait sage que l’agent, quand bien même cette marge est définie, avance « lentement » et, chaque fois, soit couvert par son client s’il présente, dans la fourchette, un prix inférieur à celui souhaité par le vendeur.

Nous aborderons les clauses suivantes dans un prochain article.

Cet article n'est valide qu'à la date où il a été publié.
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